Citations ajoutées le 07 août 2006

Hermann Hesse

  1. C'est dans ces instants où l'on passe d'un âge à un autre que le spectacle discret et délicat de l'été qui s'éteint et disparaît progressivement peut nous saisir et nous émouvoir, emplir notre coeur d'étonnement et d'horreur, nous faire trembler et sourire à la fois.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade, p.16, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  2. Comme il est merveilleux pour les vieilles gens
    De goûter un bourgogne auprès du feu
    Et de partir enfin sans adieux douloureux - 
    Mais pas encore, un peu plus tard, pas maintenant !

    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.19, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  3. Cher enfant, ce que les hommes profèrent
    Se révèle toujours plus ou moins faux ;
    Toutes proportions gardées, c'est encore au berceau
    Qu'on est le plus honnête, puis bien plus tard sous terre.

    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.29, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  4. La vieillesse ne devient médiocre que lorsqu'elle prend des airs de jeunesse.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.46, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  5. Si l'on est assez vieux, alors on a l'impression que l'existence entière, avec ses joies et ses souffrances, ses amours et ses découvertes, ses amitiés, ses liaisons, les livres, la musique, les voyages et le travail ne constituent rien d'autre qu'un long détour menant à l'éclosion de ces instants où Dieu se révèle, où le sens et la valeur de tout ce qui existe et se produit s'offrent à nous à travers la forme d'un paysage, d'un arbre, d'un visage, d'une fleur.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.54, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  6. [...] pour accomplir sa destinée d'homme âgé et remplir convenablement sa mission, il faut accepter la vieillesse et tout ce qu'elle implique, il faut acquiescer à tout cela. Sans ce consentement, sans cette soumission à toutes les exigences de la nature, notre vie perd son sens et sa valeur et, que nous soyons jeunes ou vieux, nous commettons une trahison.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.65, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  7. Dans ce jardin de la vieillesse s'épanouissent les fleurs que nous aurions à peine songé cultiver autrefois. Ici fleurit la patience, une plante noble. Nous devenons paisibles, tolérants, et plus notre désir d'intervenir, d'agir diminue, plus nous voyons croître notre capacité à observer, à écouter la nature aussi bien que les hommes. Nous laissons leur existence se développer devant nous sans éprouver aucune volonté critique, avec un étonnement toujours renouvelé face à leur diversité. Parfois nous ressentons de l'intérêt et un regret silencieux, parfois nous rions avec un enthousiasme limpide, avec humour.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.67, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  8. C'est seulement en vieillissant que l'on s'aperçoit que la beauté est rare, que l'on comprend le miracle que constitue l'épanouissement d'une fleur au milieu des ruines et des canons, la survie des oeuvres littéraires au milieu des journaux et des cotes boursières.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.72, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  9. La jeunesse a besoin de pouvoir se prendre au sérieux. La vieillesse a besoin de pouvoir se sacrifier parce qu'elle prend au sérieux ce qui la dépasse.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.72, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  10. Le long parcours d'une existence
    Semble bien court, mais long est le chemin
    Traversant la nuit...

    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.85, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  11. La dernière période d'une vie est caractérisée par un climat particulier, un manque étrange de consistance qui entraîne la perte du contact avec le réel, de la proximité avec lui. La réalité, qui constitue déjà une dimension quelque peu incertaine de l'existence, se fait encore plus ténue et transparente. Elle ne nous impose plus ses exigences avec la violence et la brusquerie d'autrefois, elle nous laisse dialoguer, traiter avec elle.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.96, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  12. Le monde nous gratifie de peu de chose à présent, il semble n'être que vacarme et angoisse ; cependant l'herbe et les arbres continuent de pousser. Et même si un jour la terre entière est recouverte de blocs de béton, la grand ballet des nuages se poursuivra dans le ciel ; ici et là des hommes continueront d'ouvrir grâce à leur art la porte d'accès au divin.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.108, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  13. Détenir la vérité, avoir raison, savoir, pouvoir distinguer précisément le bien du mal, être ainsi prêt et habilité à juger, à punir, à condamner, à faire la guerre, tout cela appartient à la jeunesse et lui sied parfaitement. Par contre, si l'on reste fidèle à ce genre d'idéal en vieillissant, alors nos capacités déjà faibles d'« éveil », de reconnaissance intuitive de la vérité divine, s'amenuisent.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.143, Livre de poche/biblio, n°3376)
     
  14. Je connais bien le sentiment de tristesse qu'inspire la précarité de toute chose, je l'éprouve à chaque fois qu'une fleur se fane. Mais il s'agit là d'une tristesse sans désespoir.
    (Éloge de la vieillesse, trad. Alexandra Cade , p.151, Livre de poche/biblio, n°3376)
     

Dennis Lehane

  1. Le chagrin [...] est carnivore. Il se repaît de vous, que vous en soyez conscient ou non, que vous luttiez ou non. En cela, il ressemble beaucoup au cancer. Et puis, un beau matin, quand vous vous réveillez, il a englouti toutes les autres émotions - joie, envie, convoitise, et même amour - . Alors, vous vous retrouvez seul, complètement nu devant lui. Et il prend possession de vous.
    (Sacré, trad. Isabelle Maillet , p.24, Rivages/Noir, n°466)
     

Dominique Doucet

  1. [Ce que Plotin] refuse, c'est une confusion : ne pas savoir distinguer entre le particulier et l'unité. Chaque réalité particulière possède une unité, mais elle n'est pas l'unité ; elle est le signe de cette dernière, elle en est un index.
    (Ne cesse pas de sculpter ta propre statue (Plotin), p.13, Éd. Pleins Feux, coll. Variations, 2005)
     
  2. La boulimie ou l'anorexie, qui frappent nos sociétés contemporaines, ne seraient-elles pas deux manières de refuser la chair ou la matière ? L'une en la noyant dans le difforme ; l'autre en l'annihilant pour ne laisser paraître que la forme.
    (Ne cesse pas de sculpter ta propre statue (Plotin), p.16, Éd. Pleins Feux, coll. Variations, 2005)
     
  3. Enlever ce qui est excès de chair pour l'individu est enlever ce qui est excès d'hérédité pour l'eugéniste.
    (Ne cesse pas de sculpter ta propre statue (Plotin), p.24, Éd. Pleins Feux, coll. Variations, 2005)
     
  4. La constitution de l'humain est dans la reconnaissance de la différence, et non dans l'abolition de toutes les différences.
    (Ne cesse pas de sculpter ta propre statue (Plotin), p.25, Éd. Pleins Feux, coll. Variations, 2005)
     
  5. Penser n'est pas seulement un exercice de l'intellect ou de la raison, une mise en oeuvre de règles formelles permettant d'aboutir à la validité ou à la non-validité d'une proposition. Penser est sans doute d'abord un exercice éthique, une physique de l'esprit, un mouvement, en un mot une activité qui réalise la puissance spirituelle de l'homme, lui donne un poids, le fait être, et en quelque sorte lui confère une incarnation.
    (Ne cesse pas de sculpter ta propre statue (Plotin), p.27, Éd. Pleins Feux, coll. Variations, 2005)
     

Plotin

  1. Comment peut-on voir cette beauté de l'âme bonne ? Reviens en toi-même et regarde : si tu ne vois pas encore la beauté en toi, fais comme le sculpteur d'une statue qui doit devenir belle ; il enlève une partie, il gratte, il polit, il essuie jusqu'à ce qu'il dégage de belles lignes dans le marbre ; comme lui, enlève le superflu, redresse ce qui est oblique, nettoie ce qui est sombre pour le rendre brillant, et ne cesse pas de sculpter ta propre statue, jusqu'à ce que l'éclat divin de la vertu se manifeste, jusqu'à ce que tu voies la tempérance siégeant sur un trône sacré. Es-tu devenu cela ? Est-ce que tu vois cela ? Est-ce que tu as avec toi-même un commerce pur, sans aucun obstacle à ton unification, sans que rien d'autre soit mélangé intérieurement avec toi-même ? Es-tu tout entier une lumière véritable, non pas une lumière de dimension ou de forme mesurables qui peut diminuer ou augmenter indéfiniment de grandeur, mais une lumière absolument sans mesure, parce qu'elle est supérieure à toute mesure et à toute quantité ? Te vois-tu dans cet état ? Tu es alors devenu une vision ; aie confiance en toi ; même en restant ici, tu as monté ; et tu n'as pas plus besoin de guide ; fixe ton regard et vois.
    (Ennéades, I, VI, cité par Dominique Doucet dans Ne cesse pas de sculpter ta propre statue, trad. Émile Bréhier, p.9, Pleins Feux coll. Variations, 2005)