Alessandro Baricco
1958
  1. [Le ragtime] est la musique sur laquelle Dieu danse quand personne ne le regarde.
    (Novecento : pianiste, trad. Françoise Brun, p.12, Mille et une nuits, n°146)
     
  2. [...] les gens sont comme ça, méchants avec ceux qui perdent.
    (Novecento : pianiste, trad. Françoise Brun, p.45, Mille et une nuits, n°146)
     
  3. [Il est question de la mer]
    C'est comme un hurlement géant mais qui ne s'arrêterait jamais de crier, et ce qu'il crie c'est  : "bande de cocus, la vie c'est quelque chose d'immense, vous allez comprendre ça oui ou non ? Immense !"

    (Novecento : pianiste, trad. Françoise Brun, p.52, Mille et une nuits, n°146)
     
  4. C'était un de ces hommes qui aiment assister à leur propre vie, considérant comme déplacée toute ambition de la vivre.
    (Soie, trad. Françoise Brun, p.10, Albin Michel)
     
  5. [...] le problème n'était pas à résoudre mais à contourner.
    (Soie, trad. Françoise Brun, p.14, Albin Michel)
     
  6. - Je n'ai même jamais entendu sa voix.
    Et un instant plus tard :
    - C'est une souffrance étrange.
    Doucement.
    - Mourir de nostalgie pour quelque chose que tu ne vivras jamais.

    (Soie, trad. Françoise Brun, p.98, Albin Michel)
     
  7. L'obscurité suspend tout. Il n'y a rien qui puisse, dans l'obscurité, devenir vrai.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.14, Albin Michel)
     
  8. Atterdel leva les yeux sur le père Pluche. C'était plus qu'un regard. C'était une visite médicale.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.31, Albin Michel)
     
  9. [...] la vie, je la veux, je ferai n'importe quoi pour l'avoir, toute la vie possible, même si je deviens folle, peu importe, je deviendrai folle tant pis mais la vie je ne veux pas la rater, je la veux, vraiment, même si ça devait faire mal à en mourir c'est vivre que je veux.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.36, Albin Michel)
     
  10. La nature a une perfection à elle, surprenante, et qui résulte d'une addition de limites. La nature est parfaite parce qu'elle n'est pas infinie. Si on comprend les limites, on comprend comment le mécanisme fonctionne.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.43, Albin Michel)
     
  11. [La pension Almayer] avait cette beauté que seuls peuvent avoir les vaincus. Et la limpidité de ce qui est faible. Et la solitude, parfaite, de ce qui s'est perdu.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.46, Albin Michel)
     
  12. [....] un regard qui ne prend pas mais qui reçoit, dans le silence le plus absolu de l'esprit [....]
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.48, Albin Michel)
     
  13. [...] la mer est sans routes, la mer est sans explications.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.59, Albin Michel)
     
  14. Il ressentit une grande ivresse : comme s'il venait de se jeter par la fenêtre. C'était un homme qui avait un certain esprit pratique : puisqu'il était là, dans les airs, il décida qu'il pouvait aussi bien essayer de voler.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.61, Albin Michel)
     
  15. Vraiment, il y a des instants où l'enchaînement logique omniprésent des causes et des effets craque, pris au dépourvu par la vie même, et descend dans le parterre, se mêlant au public, laissant sur scène, sous les projecteurs d'une liberté vertigineuse et soudaine, une main invisible pêcher dans le giron illimité du possible, et, entre des millions de choses, n'en laisser advenir qu'une seule.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.62, Albin Michel)
     
  16. [...] combien ce serait beau si, pour chaque mer qui nous attend, il y avait un fleuve pour nous. Et quelqu'un - un père, un amour, quelqu'un - capable de nous prendre par la main et de trouver ce fleuve - l'imaginer, l'inventer - et nous poser dans son courant, avec la légèreté de ce seul mot, adieu.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.66, Albin Michel)
     
  17. On croit que c'est autre chose qui sauve les gens : le devoir, l'honnêteté, être bon, être juste. Non. Ce sont les désirs qui vous sauvent. Ils sont la seule chose vraie.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.99, Albin Michel)
     
  18. S'il y a, dans le monde, un endroit où tu peux penser que tu n'es rien, cet endroit, c'est ici. Ce n'est plus la terre, et ce n'est pas encore la mer. Ce n'est pas une vie fausse, et ce n'est pas une vie vraie. C'est du temps. Du temps qui passe. Rien d'autre.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.100, Albin Michel)
     
  19. Ne rien faire est une chose. Ne rien pouvoir faire en est une autre.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.124, Albin Michel)
     
  20. - Quelquefois je me demande ce que nous sommes en train d'attendre.
    Silence.
    - Qu'il soit trop tard, madame.

    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.105, Albin Michel)
     
  21. Elles font des choses quelquefois, les femmes, ça vous tue. Toi, même dans une vie entière, tu ne serais pas capable un seul instant d'avoir cette légèreté qu'elles ont, elles, quelquefois. Elles sont légères de l'intérieur. De l'intérieur.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.144, Albin Michel)
     
  22. [...] n'est véritablement sauvé que celui qui n'a jamais été en péril.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.154, Albin Michel)
     
  23. Elle marchait, et elle savait vers quoi. C'était ça l'important. Une sensation merveilleuse. Quand le destin finalement s'entrouvre, et devient chemin visible, trace indéniable, et direction certaine. Le temps interminable de l'approche. Ce moment où l'on accoste. On voudrait qu'il ne finisse jamais. Le geste de s'en remettre au destin. C'est une émotion, ça. Plus de dilemmes, plus de mensonges. Savoir où. Et y aller. Quel qu'il soit, ce destin.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.169, Albin Michel)
     
  24. [...] on n'est jamais assez loin pour ne pas se trouver [...]
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.171, Albin Michel)
     
  25. [...] le destin n'est pas une chaîne mais un envol [...]
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.174, Albin Michel)
     
  26. C'est la musique qui est difficile, voilà la vérité, c'est la musique qui est difficile à trouver, pour se dire ces choses, quand on est si proche l'un de l'autre, la musique et les gestes, pour dissoudre le chagrin, quand il n'y a vraiment plus rien à faire, la juste musique, pour que ce soit une danse, un peu, et non pas un arrachement, de partir, de se laisser glisser loin de l'autre, vers la vie et loin de la vie, étrange pendule de l'âme, salvateur et assassin, si on savait danser cette chose-là, elle ferait moins mal, et c'est pourquoi les amants, tous, cherchent cette musique, à ce moment-là, à l'intérieur des mots, sur la poussière des gestes ; et ils savent que, s'ils en avaient le courage, seul le silence pourrait être cette musique, musique exacte, un vaste silence amoureux, clairière de l'adieu, lac fatigué qui s'écoule enfin dans la paume d'une petite mélodie, connue depuis toujours, à chanter à mi-voix.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.174, Albin Michel)
     
  27. [...] il faut toujours semer derrière soi un prétexte pour revenir, quand on part.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.177, Albin Michel)
     
  28. [...] parmi toutes les vies possibles, il faut en choisir une à laquelle s'ancrer, pour pouvoir contempler, sereinement, toutes les autres.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.182, Albin Michel)
     
  29. On prie
    pour ne pas rester seul
    on prie
    pour tromper l'attente
    que Dieu
    qu'il plaît à Dieu
    de nous entendre.

    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.195, Albin Michel)
     
  30. [...] écrire à quelqu'un est la seule manière de l'attendre sans se faire de mal.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.224, Albin Michel)
     
  31. C'est une belle manière de se perdre, que se perdre dans les bras l'un de l'autre.
    (Océan Mer, trad. Françoise Brun, p.224, Albin Michel)
     
  32. [La vie] te saute dessus quand tu as l'âme encore tout endormie, et elle t'y fait germer une image, ou une odeur, ou un son qu'ensuite tu ne peux plus ôter de là. Et le bonheur, c'était ça. Tu le découvres après, quand il est trop tard. Quand tu es déjà, pour toujours, un exilé : à des milliers de kilomètres de cette image, de ce son, de cette odeur. À la dérive.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.28, Points P373)
     
  33. [...] elle commença à pleurer, de cette manière qui est une manière magnifique, un secret de quelques-uns, ils pleurent seulement avec les yeux, comme des verres remplis à ras bord de tristesse, et impassibles, pendant que cette goutte de trop finit par avoir raison d'eux et glisser par-dessus bord, suivie de milliers d'autres, et ils restent là immobiles, pendant que s'écoule sur eux leur menue défaite.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.29, Points P373)
     
  34. [...] écrire une chose c'est la posséder - illusion à laquelle est encline une part non insignifiante de l'humanité.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.57, Points P373)
     
  35. Dans l'impossibilité de bénéficier d'un avenir heureux, elle se construisit un passé heureux.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.60, Points P373)
     
  36. On donne toujours un nom à ce qui fait peur, raison pour laquelle d'ailleurs, par prudence, les hommes en ont deux.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.73, Points P373)
     
  37. [...] lire ce n'est jamais que fixer un point pour ne pas se laisser séduire, et détruire, par la fuite incontrôlable du monde.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.81, Points P373)
     
  38. [...] lire est un obscénité bien douce. Qui peut comprendre quelque chose à la douceur s'il n'a jamais penché sa vie, sa vie tout entière, sur la première page d'un livre ? Non, l'unique, la plus douce protection contre toutes les peurs c'est celle-là - un livre qui commence.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.82, Points P373)
     
  39. [À propos d'un musicien]
    Il avait trop de notes en lui pour trouver la sienne. C'est difficile à expliquer. Mais c'était comme ça. L'infini l'avait engloutie, cette note, comme la mer peut engloutir une larme.

    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.95, Points P373)
     
  40. [...] ce qu'il y a de beau dans la vie est toujours un secret [...]
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.119, Points P373)
     
  41. L'idée n'apparut pas clairement à tout le monde, mais chacun acquiesça avec beaucoup d'éducation.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.135, Points P373)
     
  42. [...] chacun [...] hurlant ceci ou cela qu'importe, pour le plaisir, après, d'avoir hurlé.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.144, Points P373)
     
  43. Il était sans défense contre l'étonnement.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.145, Points P373)
     
  44. Démons. Anges ayant mal tourné. Mais très beaux.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.148, Points P373)
     
  45. L'angoisse lui descendit dans l'âme comme une gorgée d'eau-de-vie dans la gorge... il devint fou d'un seul coup... tandis que d'autres c'est par petits bouts...
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.150, Points P373)
     
  46. [Un homme au chevet de son ami en train de mourir.]
    Ils restèrent là, à se parler en silence, durant un temps infini.

    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.169, Points P373)
     
  47. Le destin donne d'étranges rendez-vous.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.175, Points P373)
     
  48. Mais des navires sont venus s'échouer dans les endroits les plus absurdes. Une vie peut bien elle aussi venir s'échouer sur un visage quelconque.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.176, Points P373)
     
  49. La toile d'araignée qu'était son âme pouvait à nouveau servir de piège pour ces étranges mouches que sont les idées.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.181, Points P373)
     
  50. Il est des gestes qui trouvent une justification bien des années plus tard : le bon sens posthume.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.185, Points P373)
     
  51. [Les fils] naissent avec en eux ce que la vie, chez les pères, a laissé à moitié.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.189, Points P373)
     
  52. [...] ils se tiennent là, appuyés sur eux-mêmes, sans rien d'autre à faire, pour un instant encore, qu'être eux-mêmes - tâche immense - cruel, merveilleux devoir.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.214, Points P373)
     
  53. [...] là où la vie brûle, la mort vraiment n'est rien [...]
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.227, Points P373)
     
  54. Être là, c'est déjà un geste.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.241, Points P373)
     
  55. Chacun a le monde qu'il mérite.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.259, Points P373)
     
  56. Il y a une dignité immense, chez les gens, quand ils portent leurs propres peurs sur eux, sans tricher, comme des médailles de leur médiocrité.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.260, Points P373)
     
  57. Des choses arrivent qui sont comme des questions. Une minute se passe, ou bien des années, puis la vie répond.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.261, Points P373)
     
  58. On aurait dit un homme vêtu du néant.
    (Châteaux de la colère, trad. Françoise Brun, p.279, Points P373)
     
  59. Quelquefois, hasarder des réponses est seulement une manière d'éclaircir pour soi-même des questions.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.9, Albin Michel 1998)
     
  60. L'aphorisme, même quand il se présente sous la forme d'un jugement définitif et péremptoire, ne fait pas autre chose qu'inaugurer la réflexion : jamais la conclure.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.11, Albin Michel 1998)
     
  61. Aucune oeuvre d'art n'est assez forte pour survivre à la surdité de ceux qui l'écoutent.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.43, Albin Michel 1998)
     
  62. La liberté de l'interprétation réside dans le fait qu'il lui faut inventer quelque chose qui n'existe pas : ce texte-là dans cette époque-ci. En fin de compte, ce n'est plus l'interprète qui est libre : c'est l'oeuvre qui, à travers le geste de l'interprétation, se libère. Se libère de cette identité dans laquelle la tradition l'avait figée. Devient libre de se réinventer suivant les dynamiques de l'époque nouvelle qu'elle rencontre. L'interprète est l'instrument, non le sujet, de cette liberté.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.55, Albin Michel 1998)
     
  63. La musique contemporaine est le prix ennuyeux auquel on achète au présent un visa pour le passé.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.70, Albin Michel 1998)
     
  64. [...] les gens ont peur de leur propre époque mais en même temps ils la désirent, et ne veulent pas en être dépossédés.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.104, Albin Michel 1998)
     
  65. [...] le néant d'une chanson commerciale.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.105, Albin Michel 1998)
     
  66. L'histoire de la musique est d'abord et avant tout l'histoire d'une recherche sans fin de spectaculaire. L'émotion et la surprise : pas une seule marche, dans l'aventure de la musique cultivée, qui n'ait été gravie dans le but de créer d'abord ces deux sortilèges.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.144, Albin Michel 1998)
     
  67. Vivre la modernité et lui résister. La construire et non pas simplement la consommer.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.146, Albin Michel 1998)
     
  68. Les oeuvres d'art ne se font pas. Elles adviennent.
    (L'âme de Hegel et les vaches du Wisconsin, trad. Françoise Brun, p.147, Albin Michel 1998)
     
  69. Il faisait partie de ces gens qui sucent la branche de leurs lunettes.
    (City, trad. Françoise Brun, p.15, Albin Michel 2000)
     
  70. [...] il y a toujours quelque chose de bon même chez le pire des pères [...].
    (City, trad. Françoise Brun, p.21, Albin Michel 2000)
     
  71. [...] ce n'est pas la même chose d'entendre quelqu'un rester muet et d'entendre un muet se taire. C'est un silence différent.
    (City, trad. Françoise Brun, p.33, Albin Michel 2000)
     
  72. Il soutenait que l'univers était " un match joué sans arbitre " mais à sa manière croyait en Dieu : " C'est un juge de touche qui laisse passer tous les hors-jeu. "
    (City, trad. Françoise Brun, p.38, Albin Michel 2000)
     
  73. [...] pour apprendre à boxer il suffit d'une nuit. [...] il faut une vie entière pour apprendre à combattre.
    (City, trad. Françoise Brun, p.77, Albin Michel 2000)
     
  74. Rien ne peut devenir aussi insignifiant que ce à côté de quoi l'on se réveille chaque matin de son existence.
    (City, trad. Françoise Brun, p.106, Albin Michel 2000)
     
  75. Mais c'est un élément constitutif du génie que cette obstination sans limites qui le pousse à poursuivre ses propres objectifs avec un souci hypertrophié de perfection.
    (City, trad. Françoise Brun, p.107, Albin Michel 2000)
     
  76. Car c'est exactement ainsi qu'apparaît la position destinale de l'homme : être face au monde, avec soi-même dans le dos.
    (City, trad. Françoise Brun, p.172, Albin Michel 2000)
     
  77. Des fois les gens se punissent pour des choses qu'ils ne savent même pas, comme ça, pour le goût de se punir... ils décident de se punir...
    (City, trad. Françoise Brun, p.184, Albin Michel 2000)
     
  78. Tout serait plus simple si on ne t'avait pas inculqué cette histoire d'arriver quelque part, si seulement on t'avait appris, plutôt, à être heureux, en restant immobile. Toutes ces histoires à propos de ton propre chemin. Trouver ton chemin. Suivre son chemin. Alors que si ça se trouve on est fait pour vivre sur une place, ou dans un jardin public, là sans bouger, à faire que la vie passe, si ça se trouve on est un carrefour, le monde a besoin qu'on reste là sans bouger, ce serait une catastrophe si on s'en allait, à un moment donné, suivre notre route, mais quelle route ? les autres sont des routes, moi je suis une place, je ne mène à aucun endroit, je suis un endroit.
    (City, trad. Françoise Brun, p.209, Albin Michel 2000)
     
  79. [...] tu ne trouveras jamais rien de plus sauvage ni de plus primitif que deux intellectuels se livrant un duel. Ni rien de plus malhonnête.
    (City, trad. Françoise Brun, p.224, Albin Michel 2000)
     
  80. [...] l'idée même d'honnêteté intellectuelle est un oxymore.
    (City, trad. Françoise Brun, p.237, Albin Michel 2000)
     
  81. [...] les médiocres ne savent pas qu'ils sont médiocres, c'est ça leur problème, parce qu'ils sont médiocres il leur manque l'imagination pour penser que quelqu'un peut être meilleur qu'eux, alors si quelqu'un l'est effectivement c'est qu'il a quelque chose qui ne va pas, c'est qu'il a triché quelque part, ou finalement c'est un fou qui s'imagine être meilleur qu'eux, donc c'est un prétentieux, comme ils vont sûrement te le faire comprendre très vite et avec des systèmes pas vraiment agréables, et même avec cruauté, des fois, ça c'est typique des médiocres, être cruels, la cruauté c'est la vertu par excellence des médiocres, ils ont besoin d'exercer leur cruauté, un exercice pour lequel il n'est pas nécessaire d'avoir la moindre intelligence, et ça les aide, évidemment, ça leur rend l'opération facile, ça les fait exceller, si on peut dire, dans cette opération d'être cruels, chaque fois qu'ils le peuvent, c'est-à-dire souvent, plus souvent que tu ne t'y attendras [...].
    (City, trad. Françoise Brun, p.246, Albin Michel 2000)
     
  82. La Grèce était pleine de Grecs qui n'y sont pas, dans Homère, de même que le monde est plein de gens qui ne sont pas prévus dans les films d'Hollywood. Homère, c'est la culture des vainqueurs, du plus grand nombre, de ceux qui avaient réussi. Il faut vous faire une raison : Homère, c'était les Américains.
    (Next, trad. Françoise Brun, p.63, Albin Michel, 2002)
     
  83. Je ne crois pas que, s'il y a une « bonne » globalisation, elle peut être réalisée par des têtes qui s'en vont détruire les McDonald's ou qui ne voient que des films français. Ce à quoi je pense, c'est autre chose. Je pense à des gens convaincus que la globalisation, telle qu'on est en train de nous la vendre, n'est pas un rêve erroné : c'est une rêve petit. Arrêté. Bloqué. C'est un rêve en gris, parce qu'il sort directement de l'imaginaire des chefs d'entreprise et des banquiers. En un certain sens, il s'agirait de commencer à rêver à ce rêve à leur place : et à le réaliser. C'est une question d'imagination, de ténacité et de colère. C'est peut-être cela, la tâche qui nous attend.
    (Next, trad. Françoise Brun, p.69, Albin Michel, 2002)
     
  84. [...] les choses ne sont plus ce qu'elles sont mais ce qu'elles génèrent.
    (Next, trad. Françoise Brun, p.74, Albin Michel, 2002)
     
  85. Se demander si les choses sont vraies avant de se demander ce que nous en pensons est un exercice qui finit par paraître ingénu, tant il est passé de mode.
    (Next, trad. Françoise Brun, p.77, Albin Michel, 2002)
     
  86. [La République de Platon] est un genre de pamphlet contre Hollywood.
    (Next, trad. Françoise Brun, p.101, Albin Michel, 2002)
     
  87. Nous avons bouleversé la terre d'une manière si violente que nous avons réveillé la férocité des enfants.
    (Sans sang, trad. Françoise Brun, p.69, Albin Michel, 2003)
     
  88. On a beau s'efforcer de vivre une seule vie, les autres verront mille autres vies dedans, et c'est pour ça qu'on n'arrive pas à éviter de se faire du mal.
    (Sans sang, trad. Françoise Brun, p.87, Albin Michel, 2003)