Henri Gougaud
1936
  1. Savoir est ma façon d'aimer.
    (L'Inquisiteur, p.30, coll. Points R206)
     
  2. Pour juger sans faute [...] il ne faut pas avoir le pouvoir de condamner.
    (L'Inquisiteur, p.45, coll. Points R206)
     
  3. [...] la tranquillité des pauvres est dans le mépris des puissants [...]
    (L'Inquisiteur, p.58, coll. Points R206)
     
  4. Trahir les puissants est le devoir des pauvres, s'ils veulent vivre dignement.
    (L'Inquisiteur, p.63, coll. Points R206)
     
  5. [...] Dieu est le rêve des pauvres, et le diable la folie des puissants.
    (L'Inquisiteur, p.115, coll. Points R206)
     
  6. Peut-être Dieu est-il cela : l'âme des mots.
    (L'Inquisiteur, p.120, coll. Points R206)
     
  7. Ne rien attendre, [...] ne rien vouloir, être accueillant à tout ce qui peut advenir, savoir Dieu indifférent et lui faire pourtant confiance.
    (L'Inquisiteur, p.128, coll. Points R206)
     
  8. De quel secours, de quel bienfait serait un compagnon de route occupé d'espérances semblables aux siennes, et cheminant vers les mêmes mystères !
    (L'Inquisiteur, p.133, coll. Points R206)
     
  9. Mais deux corps accolés ne serait-ce qu'une fois ne se défont jamais tout à fait l'un de l'autre. Ils restent joints par une sorte d'envoûtement sacré, par un tutoiement invincible, par une commune maladie de douceur que ni la révolte ni l'oubli ne peuvent guérir.
    (L'Inquisiteur, p.145, coll. Points R206)
     
  10. Seuls, les puissants et les grands brigands confondent la vie et le monde. Ils sont fous ; ils croient que pour atteindre le paradis il suffit de poser son cul sur la tête des pauvres et de les cravacher pour les pousser au ciel.
    (L'Inquisiteur, p.166, coll. Points R206)
     
  11. Ce qui rend effrayants les masques du pouvoir est l'irrémédiable absence d'amour.
    (L'Inquisiteur, p.166, coll. Points R206)
     
  12. La vérité tombe de l'esprit quand elle est mûre, comme le fruit de l'arbre. Elle n'est pas plus exprimable que la saveur d'une pomme. Il faut être bien extravagant pour s'escrimer à dire aux gens la saveur d'une pomme.
    (L'Inquisiteur, p.168, coll. Points R206)
     
  13. Les vrais chemins sont ceux du coeur, pas ceux du monde.
    (L'Inquisiteur, p.209, coll. Points R206)
     
  14. Quand on veut perdre un homme [...], il n'est pas nécessaire de lui mentir. Il suffit de lui opposer une vérité assez lumineuse pour l'aveugler, et assez forte pour qu'il se casse la tête contre elle.
    (L'Inquisiteur, p.216, coll. Points R206)
     
  15. Où est le pouvoir de contraindre, l'amour n'est pas.
    (L'Inquisiteur, p.216, coll. Points R206)
     
  16. Par malheur, les plus vrais, les plus bienfaisants des sentiments ne peuvent vivre que dans un grand silence solitaire, au plus obscur de nos chairs, de nos sangs, de nos brumes.
    (L'Inquisiteur, p.234, coll. Points R206)
     
  17. Il est des routes qui vont au feu, d'autres aux cimes, d'autres aux villages. À chacun la sienne. J'ignore ce qu'est la pureté, mais je sais que la folie est de ne pas suivre sa route.
    (L'Inquisiteur, p.247, coll. Points R206)
     
  18. On ne pouvait être assuré de rien, dans cette vie, sauf de rencontrer un jour ou l'autre un inévitable trou et de s'y défaire comme un nuage dans l'indifférence du ciel.
    (Bélibaste, p.16, coll. Points P306)
     
  19. Quelle bizarre folie que la vie en ce monde !
    (Bélibaste, p.76, coll. Points P306)
     
  20. -Quoi, vous avez peur des crottes et de la pouillerie des petites bêtes ? N'avez-vous donc jamais rien subi de plus cuisant que ce baptême merdeux ?
    -Non, répondit Philippe rageusement. Évente-moi, Guillaume, cette puanteur m'étouffe.
    Bélibaste obéit en riant et dit avec malice :
    -Vous m'avez assuré un jour que la lumière divine brûlait au plus profond de nos nuits. Est-il plus épaisse nuit que celle de nos culs, Monseigneur ?

    (Bélibaste, p.87, coll. Points P306)
     
  21. [...] la tendresse et le corps d'une femme, ce paradis des pauvres en espoir.
    (Bélibaste, p.113, coll. Points P306)
     
  22. [...] le plus grand péché est sans doute de refuser l'amour quand il vient dans une vie, malgré le mal qu'il fait.
    (Bélibaste, p.121, coll. Points P306)
     
  23. Les larmes sont la pluie de l'âme. Elles lavent toutes les crasses.
    (Bélibaste, p.160, coll. Points P306)
     
  24. -L'hiver prochain je viendrai te rejoindre, et nous vivrons ensemble dans la même maison, et nous ne nous quitterons plus.
    Elle leva vers lui son visage ruisselant de larmes, le regard illuminé par l'espoir.
    -Tu comprends, dit-elle, j'ai peur de me perdre si tu n'es pas près de moi. Le monde est trop grand.

    (Bélibaste, p.165, coll. Points P306)
     
  25. Le rire est meilleur que la prière pour le salut de l'âme.
    (Bélibaste, p.258, coll. Points P306)
     
  26. À force de croire en Dieu, si l'on s'acharne assez, on finit un jour par l'inventer. Alors Il naît.
    (Bélibaste, p.280, coll. Points P306)
     
  27. Un conseil, pour moins souffrir : ôte-toi de la cervelle que tu as le pouvoir de gouverner ta vie. Laisse aux autres cette illusion.
    (Bélibaste, p.284, coll. Points P306)
     
  28. Plus un homme a de pouvoir, plus il fait froid auprès de lui. Un voleur peut être digne d'amour et de confiance, un roi, un pape, jamais.
    (Bélibaste, p.286, coll. Points P306)
     
  29. Ainsi les hommes traversent les jours et les nuits du monde, cherchent et parfois trouvent pour quelle oeuvre ils sont un instant venus.
    (Bélibaste, p.292, coll. Points P306)
     
  30. [...] elle était en vérité de ces êtres irréductibles qui par haine du monde ou par rage de vivre ne renoncent jamais à mordre ou à aimer.
    (L'homme à la vie inexplicable, p.85, coll. Points P305)
     
  31. [On reconnaît un égaré] à ce qu'il en vient à maudire sa propre vie, sur le chemin où il est.
    (L'homme à la vie inexplicable, p.110, coll. Points P305)
     
  32. [...] quand on endure le tourment, [...] pour toujours on se croit son esclave, et quand la paix est de retour, ce sont les souffrances qui semblent n'avoir jamais été, ce sont elles qui s'effacent dans un passé tout à coup si lointain que l'on se prend à douter de l'avoir traversé.
    (L'homme à la vie inexplicable, p.125, coll. Points P305)
     
  33. Souviens-toi de ne jamais appeler Dieu à ton aide, car ce sont les enfants qui demandent secours. Les hommes véritables servent Celui qui brûle en eux et en Son nom agissent, sans rien vouloir pour leur propre bien-être. Là est la liberté la plus digne que je connaisse.
    (L'homme à la vie inexplicable, p.137, coll. Points P305)
     
  34. Il ne sait rien des femmes. Il ne sait pas qu'elles peuvent faire leur maison dans la main de l'homme, pour peu qu'elle leur soit tendue. Il ne sait pas qu'elles sont capables de marcher jusqu'au bout du monde pour un regard qui les fasse vivre. Il ne sait pas qu'elles savent attendre comme aucune bête ne le peut. Les épousées, les abandonnées attendent, les filles de bordel, les saintes attendent. Les hommes vont, les femmes attendent. Jusqu'au fond des fonds de l'espérance elles attendent. Jusqu'à la haine même. Et quand la haine vient aux femmes, que Dieu protège ceux qui les ont bafouées.
    (L'homme à la vie inexplicable, p.155, coll. Points P305)
     
  35. [...] la mort n'est rien, elle est sans cesse derrière vous, elle est la poussière de vos semelles. La vie est devant, toujours devant, allez à elle, ne vous retournez jamais.
    (L'homme à la vie inexplicable, p.223, coll. Points P305)
     
  36. Perdu d'avance est l'homme qui ne suit pas ses rêves.
    (L'homme à la vie inexplicable, p.256, coll. Points P305)
     
  37. Je sais maintenant que quoi que j'apprenne, dussé-je atteindre la science des grands hommes, ce ne sera jamais que presque rien, une goutte de source à la soif qui me tient. Mais je pressens que cela est bel et bon, car peut-être dans le seul désir tous les jours ranimé est le secret du monde.
    (L'homme à la vie inexplicable, p.259, coll. Points P305)
     
  38. Il n'est nulle part deux mots semblables, pas plus qu'il n'est deux gestes identiques.
    (Le trouveur de feu, p.10, coll. Points R695)
     
  39. Il est comme une planète sans soleil. Il a besoin d'aide [...].
    (Le trouveur de feu, p.61, coll. Points R695)
     
  40. Je veux savoir, user mon esprit à le frotter jusqu'à la transparence contre tous les mystères du monde [...].
    (Le trouveur de feu, p.131, coll. Points R695)
     
  41. En vérité, nous soupçonnons parfois notre mémoire d'enchanter faussement le passé, alors qu'elle est fidèle à ce qui fut, et que seules sont trompeuses les mélancolies qui nous font douter d'elle.
    (Paramour, p.11, Seuil)
     
  42. [...] seul le souffle de l'amour peut porter sans dommage d'un être à l'autre les nourritures de l'âme.
    (Paramour, p.16, Seuil)
     
  43. Il avait cette étrange vertu de s'éclairer soudain, comme un ciel délivré après un temps d'orage.
    (Paramour, p.17, Seuil)
     
  44. [...] les contes sont des femmes enceintes, ils portent la vraie vie en eux, l'oreille est le berceau où ils la mettent au monde, et qui ne les croit pas est plus fou qu'ils ne sont !
    (Paramour, p.51, Seuil)
     
  45. Mais qui peut pénétrer l'intimité des êtres ? Seigneur, la distance est moins longue du regard à l'étoile que de l'oeil du dehors à la vie du dedans !
    (Paramour, p.64, Seuil)
     
  46. Elle était de ces êtres qui ne gaspillent pas leurs battements de coeur en inquiétudes subalternes.
    (Paramour, p.67, Seuil)
     
  47. Qui donc a pénétré assez profondément les mystères de la vie pour affirmer le vrai, le faux ou l'impossible ?
    (Paramour, p.102, Seuil)
     
  48. Peut-être chacun de nous vient-il sur cette terre accomplir quelque obscur ou lumineux ouvrage. Quel est-il ? Dieu seul sait. Peut-être ne sommes-nous que son regard et sa bouche, ses mains et son ouïe, rien d'autre que son désir de découvrir sa Création. Il m'arrive d'imaginer que je suis venu respirer pour lui le parfum de telle rose, tel jour, dans tel jardin, et que ma vie n'est qu'une brève ou longue attente de cet instant.
    (Paramour, p.110, Seuil)
     
  49. Il est parfois de purs instants de transparence où semble s'effacer toute frontière entre le dehors et le dedans, où l'âme et le jardin se regardent, se découvrent accordés et s'accueillent dans la paisible évidence d'une amitié plus ancienne et fidèle que la mémoire des jours.
    (Paramour, p.113, Seuil)
     
  50. Quand nous désertent le désir de vivre et la force d'aimer, le monde nous apparaît inhabité. Nous ne percevons plus du vent que sa course sans but, du ciel que sa lumière aveugle, de l'espace que son impassible démesure. Sans doute, s'il en est ainsi, c'est que ces lieux où vont nos vies ne sont rien d'autre que les reflets exacts de nos âmes.
    (Paramour, p.131, Seuil)
     
  51. Il en va ainsi de la vie. Elle n'a de foi qu'en elle-même. Quand aucune pensée ne l'entrave elle va contre toute raison sans autre but que d'être encore, un jour, une heure, un pas de plus.
    (Paramour, p.141, Seuil)
     
  52. [...] l'âme de celui qui met un fils au monde ne peut pas croire au silence du néant.
    (Paramour, p.158, Seuil)
     
  53. On n'oublie jamais ce qu'on aime.
    (Paramour, p.199, Seuil)
     
  54. [...] on ne parle jamais aussi bien qu'aux visages inaccessibles.
    (Paramour, p.201, Seuil)
     
  55. [...] il faut tout faire comme si rien ne devait nous être donné en échange et en même temps cheminer comme si Dieu nous menait sans cesse à des miracles.
    (L'Expédition, p.31, Seuil, 1991)
     
  56. Dans l'ombre ou la lumière, [la rivière] court avec la même foi.
    (L'Expédition, p.83, Seuil, 1991)
     
  57. [...] il se sentit bientôt encombré de tendresse.
    (L'Expédition, p.84, Seuil, 1991)
     
  58. - [...] aller au bout du monde.
    - Dieu du ciel ! pour quoi faire ?
    - Pour être là, debout sur la dernière falaise, avec l'infini devant lui et appeler quelqu'un, je ne sais qui.

    (L'Expédition, p.109, Seuil, 1991)
     
  59. Apprendre sans repos à voir clair dans le jeu de ceux qui veulent nous tenir en bride afin d'en être libres, dans le jeu de Dieu afin qu'il soit servi, et dans nos coeurs afin qu'ils soient en paix, voilà, assurément, le seul travail qui vaille.
    (L'Expédition, p.160, Seuil, 1991)
     
  60. Cet homme est comme une forêt, il se croit tout obscur, il est partout troué de rayons de soleil.
    (L'Expédition, p.190, Seuil, 1991)
     
  61. Prisonniers des absents, mon ami, ainsi sommes-nous. Le regret du passé, la peur de l'avenir nous égarent sans cesse. Nous cherchons obstinément des chemins dans ces inexistences. Et pendant ce temps-là, la vie émerveille le monde et nous attend, infiniment patiente.
    (L'Expédition, p.196, Seuil, 1991)
     
  62. Dieu n'attend rien de nous [...]. Ni au ciel, ni ailleurs il n'est de tribunal. En nous seuls sont nos juges, et nos propres bourreaux, et nos mauvais larrons.
    (L'Expédition, p.200, Seuil, 1991)
     
  63. [...] les vrais outils de Dieu sont les plus faibles des êtres parce qu'eux seuls savent faire germer l'amour sans méfiance dans l'âme de ceux qui les contemplent.
    (L'Expédition, p.214, Seuil, 1991)
     
  64. Ce qu'on pense, ce qu'on veut, ne veut pas, ce qu'on craint, qu'on espère, tout cela va et vient, ce n'est pas la vraie vie, c'est la couleur du temps.
    (L'Expédition, p.232, Seuil, 1991)