René Barjavel
1911-1985
  1. [...] comme un oiseau dans une cage. Il a mal aux ailes...
    (Une rose au paradis, p.18, France Loisirs)
     
  2. Quand on se croit obligé d'exprimer sa gratitude, on perd la moitié de sa joie.
    (Une rose au paradis, p.65, France Loisirs)
     
  3. Les hommes d'État n'ont ni le temps ni l'habitude de prévoir. Ils vivent au jour le jour, tous les événements les surprennent, et les problèmes qu'ils s'efforcent de résoudre sont ceux de la veille ou de l'avant-veille, qu'ils n'ont d'ailleurs pas encore compris.
    (Une rose au paradis, p.84, France Loisirs)
     
  4. Les hommes rêvent, se fabriquent des mondes idéaux et des dieux. Les femmes assurent la solidité et la continuité du réel.
    (Une rose au paradis, p.95, France Loisirs)
     
  5. Chaque fleur est un sexe. Y avez-vous pensé quand vous respirez une rose?
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  6. Tu y es à ta place, avec ta forme à toi, et ta fonction, que tu ignores. Tu travailles, tu dors, tu respires sans te préoccuper. Tu existes. Comme le grain de sable sur la plage.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  7. L'amour, c'est l'oubli de soi.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  8. Le nom de Dieu a trop servi.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  9. Mais qu'est-ce que c'est, la Nature?
    Cette entité, à laquelle se réfèrent les esprits rationalistes pour expliquer l'inexplicable, ressemble beaucoup à un dieu auquel on n'ose pas dire son nom, et qu'on a amputé de toute volonté et de tout esprit d'initiative.

    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  10. La vie telle que nous la vivons, telle que nous la connaissons, c'est d'abord la souffrance et le meurtre.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  11. Pourquoi tuer?
    Pour survivre.
    Et pourquoi survivre? Pour tuer?

    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  12. Un dé à coudre rempli de tourbillons de rien: c'est l'humanité.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  13. Le monde est infini non seulement dans toutes les directions de l'espace, mais aussi dans ses vérités.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  14. Si la vie existe en dehors de la planète terre, s'il existe quelque part ailleurs des êtres vivants, ce serait un bien grand hasard, une bien étrange coïncidence, qu'ils soient dotés des mêmes sens que nous... Imaginez qu'ils arrivent, qu'ils nous conquièrent, qu'ils nous goûtent et qu'ils nous trouvent bons!
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  15. Le naturel est miraculeux.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  16. Le hasard ne conçoit pas, n'ajuste pas, n'organise pas. Le hasard ne fait que de la bouillie.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  17. Alors d'où viennent l'oreille et la marguerite?
    IL Y A QUELQU'UN.
    Il y a quelqu'un sous le lit, dans l'armoire! Il y a quelqu'un dans notre vie, dans notre chair. Quelqu'un qui nous a faits et qui fait de nous ce qu'il veut.

    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  18. Nul ne sait plus ce que signifie le nom de Dieu.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  19. L'adorer ou le haïr est pareillement infantile.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  20. On ne hait pas, on n'adore pas un je-ne-sais-quoi
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  21. Le Dieu-papa que nous proposent les religions leucémiques est une tentative aussi dérisoire et aussi cocasse d'apaiser notre soif que l'octroi d'une goutte de sirop à un déshydraté.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  22. L'homme en train de devenir géant serre contre son coeur l'arme de suicide. L'actionnera-t-il avant d'avoir escaladé le ciel?
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  23. Rien ne justifie la guerre. Jamais.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  24. La guerre est un processus d'automutilation déclenché au sein de l'espèce humaine par la violation de la loi d'équilibre du monde vivant.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  25. Ni la loi ni l'espèce ne se soucient des individus.
    Mais ce sont les individus qui vont griller.

    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  26. Pauvres petits curés joueurs de ballon, pauvres pasteurs bêlants, que sont-ils capables d'expliquer, eux qui non seulement ignorent tout du Créateur et de la Création, mais ne comprennent rien à la créature?
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  27. Dieu n'est pas bon non plus. Il suffit de jeter un coup d'oeil sur le monde pour se rendre à l'évidence. C'est la contradiction entre cette évidence et le bon Dieu vanté par des propagandistes puérils qui multiplie les incroyants.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  28. Je suis profondément convaincu, que la vérité de Dieu n'est pas plus mystérieuse que la vérité scientifique.
    Mais nous sommes intoxiqués par les fumées d'encens dressées comme un rideau stratégique entre Dieu et les hommes.

    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  29. Le prêtres ont reçu la clé de l'alphabet et la mission de la transmettre. Malheureusement, ils l'ont perdue en chemin.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  30. Il faut que vienne le temps de l'évidence. Dieu doit nous être montré comme deux et deux font quatre.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  31. Vous l'avez vu, vous, le Constructeur?
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  32. Dieu est entier dans chaque portion de sa création. Il est entier dans chaque créature.
    Attention! Il est en toi, tout entier!
    Il est dans moi!
    Nous voilà bien avancés...
    Tu le sens, toi?
    Zéro...

    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  33. Dieu n'est plus accessible qu'aux aventuriers.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  34. Quand les églises prétendent que Dieu n'est ni montrable ni démontrable, elles ne démontrent que l'ignorance où elles sont tombées.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  35. On ne quitte pas un maison qu'on trouve sale. On la nettoie.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  36. Rien ne justifie la souffrance des innocents. Le Tout n'est pas assez pour payer un agneau égorgé.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  37. Ce-qui-crée crée sa Création.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  38. C'est l'oeil qui fait la lumière.
    (La faim du tigre, Folio n° 847)
     
  39. Les pères sont toujours entrain de faire une guerre, et quand ils en reviennent, les enfants ont grandi et les mères sont mortes.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  40. Il rêvait très lentement, car sa vie était lente.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  41. La nuit n'est nuit que pour nous. Ce sont nos yeux qui sont obscurs.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  42. Tout homme plongé dans l'obscurité écarquille les paupières comme si de plus de ténèbres absorbées pouvait naître la lumière.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  43. Il est de ceux derrière qui l'herbe se redresse. Il pèse à peine la moitié de son poids.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  44. Les femmes aiment que l'homme qui les aime, pendant qu'il les aime, leur donne un nom de nuit. C'est la marque de leur entente, la clé secrète du langage de l'amour que l'on parle à voix basse, quand chaque mot qui ne signifie rien dit tout. Et s'il arrive que ce nom de nuit échappe aux lèvres de l'homme pendant les heures diurnes, la femme sent tout à coup la chaleur de son sang dans son corps.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  45. Les hommes croient choisir leur femme: c'est toujours la femme qui harponne. Mais sa décision n'est pas libre non plus. Elle est le résultat des rencontres, des humeurs, du milieu. On se marie par hasard. Il y a des hasards heureux.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  46. Une femme qui aime n'admet pas qu'un homme puisse avoir une pensée, un geste, un soupir, qui ne lui soit pas destiné. Elle ne tolère pas qu'il travaille, qu'il respire.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  47. Trop souvent, un savant n'est devenu savant que pour se venger de ses imperfections physiques.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  48. Tout homme en sait autant que Dieu. Mais il ignore ce qu'il sait.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  49. Les savants sont des enfants qui s'amusent. Ils ouvrent les choses pour voir ce qu'il y a dedans, ils envoient des cailloux dans le ciel et ils se créent un vocabulaire à eux, pour que personne ne le comprenne, pour fermer le clan, la petite bande.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  50. Il arrive rarement qu'un homme dise à une femme qu'elle est intelligente. Il a bien d'autres compliments à lui faire. Aussi toute femme se trouve-t-elle étonnée et flattée de se l'entendre dire. Même si elle l'est.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  51. La vérité, c'est ce qu'on croit.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  52. La terre est une graine en train de germer.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  53. Celui qui copie la nature est impuissant, celui qui l'interprète est ridicule, celui qui l'ignore n'est rien du tout.
    (Colomb de la lune, Folio n° 955)
     
  54. L'homme m'embête! Si on l'écoutait, on ne s'occuperait que de lui!
    (Si j'étais Dieu..., p.21, Garnier)
     
  55. Comment puis-je croire ce que je ne comprends pas?
    (Si j'étais Dieu..., p.33, Garnier)
     
  56. Il n'y a pas de détail! Chaque infime partie contient Tout...
    (Si j'étais Dieu..., p.61, Garnier)
     
  57. Rien n'est impossible à la mauvaise volonté de l'homme.
    (Si j'étais Dieu..., p.63, Garnier)
     
  58. Le temps est le même pour tous mais différent pour chacun. C'est l'illusion des illusions, et c'est pourtant la base du réel. Sans le temps l'espace disparaît, car pour aller d'un point à un autre de l'espace il faut du temps. Même pour imaginer le voyage...
    (Si j'étais Dieu..., p.65, Garnier)
     
  59. Si je mets dix hommes sur une île déserte, la loi d'attraction va les rassembler en deux groupes, et la loi d'opposition leur inspirer des idées absolument contraires sur la façon d'organiser l'île. Si un groupe pense "nord", l'autre groupe, par réflexe immédiat, pensera "sud". Et ils commenceront à ramasser des cailloux pour se convaincre réciproquement en se les envoyant sur la figure. Si un des deux groupes se montre plus fort et absorbe l'autre, une force d'opposition va naître en lui, grandir et le couper de nouveau en deux ou en plusieurs morceaux. C'est la loi!
    Ce n'est pas cela qui fait le malheur des hommes. Ils pourraient entre l'attraction et l'opposition, trouver un équilibre et vivre en paix, comme le soleil et les planètes. Ce qui les rend malheureux, c'est le bonheur. L'idée qu'ils s'en font, et de besoin de l'attraper. Ils s'imaginent qu'ils sont malheureux aujourd'hui, mais qu'ils pourront être heureux demain, s'ils adoptent certaine forme d'organisation. Chaque groupe a une idée d'organisation différente. Non seulement il se l'impose à lui-même, à grande souffrance, mais il cherche à l'imposer à l'autre groupe, qui n'en veut absolument pas, et qui essaie au contraire de lui faire avaler de force sa propre cuisine.
    Et chaque individu croit qu'il sera heureux demain, s'il est plus riche, plus considéré, plus aimé, s'il change de partenaire sexuel, de voiture, de cravate ou de soutien-gorge. Chacun, chacune attend de l'avenir des conditions meilleures, qui lui permettront, enfin, d'atteindre le bonheur. Cette conviction, cette attente, ou le combat que l'homme mène pour un bonheur futur, l'empêchent d'être heureux aujourd'hui. Le bonheur de demain n'existe pas. Le bonheur, c'est tout de suite ou jamais. Ce n'est pas organiser, enrichir, dorer, capitonner la vie, mais savoir la goûter à tout instant. C'est la joie de vivre, quelles que soient l'organisation et les circonstances. C'est la joie de boire l'univers par tous ses sens, de goûter, sentir, entendre, le soleil et la pluie, le vent et le sang, l'air dans les poumons, le sein dans la main, l'outil dans le poing, dans l'oeil le ciel et la marguerite.
    Si tu ne sais pas que tu es vivant, tout cela tourne autour de toi sans que tu y goûtes, la vie te traverse sans que tu retiennes rien des joies ininterrompues qu'elle t'offre.

    (Si j'étais Dieu..., p.66, Garnier)
     
  60. Tu es assis près d'un ruisseau et tu as soif. Même si tu es idiot, tu sais que l'eau va te désaltérer. C'est ça comprendre...
    (Si j'étais Dieu..., p.69, Garnier)
     
  61. Le pire des crimes, c'est de torturer ou massacrer les êtres humains pour faire leur salut ou leur bonheur selon sa propre idée.
    (Si j'étais Dieu..., p.80, Garnier)
     
  62. L'inutile et le superflu sont plus indispensables à l'homme que le nécessaire. Le chant du merle est inutile, la rose est superflue. Le travail est nécessaire...
    (Si j'étais Dieu..., p.149, Garnier)
     
  63. Le monde est un livre ouvert. Autour de nous, en nous, il nous présente ses messages, les infinies variations de sa beauté, et ses certitudes. Chacun peut y lire directement ce qui lui est offert, et offert à tous. Il lui suffit d'ouvrir sa curiosité, son intelligence et son coeur.
    (Demain le paradis, p.78, Denoël)
     
  64. Ce qui, justement, fait le prix, la qualité de la vie humaine, c'est sa brièveté.
    (Demain le paradis, p.81, Denoël)
     
  65. J'ai beaucoup travaillé, et je continue. J'ai aimé ce que je faisais, même quand je ne faisais pas ce que j'aimais.
    (Demain le paradis, p.85, Denoël)
     
  66. En parlant du pétrole: [...] du jus de cadavres.
    (Demain le paradis, p.130, Denoël)
     
  67. C'est la forme la plus exquise du comportement politicien, qui consiste à utiliser un fait vrai pour en faire un mensonge.
    (Demain le paradis, p. 138, Denoël)
     
  68. Nos petits-enfants seront en paix, ou ne seront pas.
    (Demain le paradis, p. 178, Denoël)
     
  69. L'inutilité totale, degré suprême du luxe...
    (Journal d'un homme simple, p. 45, Denoël)
     
  70. On se sait jamais rien. Sauf ce qui est sans importance.
    (La tempête, p. 46, Éd. Denoël)
     
  71. Vous savez bien, Vous [en parlant de Dieu], que les hommes ne sont pas coupables, ils sont seulement stupides, Vous ne pouvez pas les punir si cruellement de leur bêtise!... Ils ont mordu trop tôt aux fruits de la science, ils n'étaient pas en état de les digérer... Ils auraient dû attendre qu'un nouvel estomac leur soit poussé...
    ( La tempête, p. 214, Éd. Denoël)
     
  72. L'essentiel est de lire beaucoup. N'importe quoi. Ce qu'on a envie de lire. Le tri se fait après. Et même la littérature stérilisante, la littérature prétentieuse, philosophisante, cuistre, est sans danger pour les enfants parce qu'ils ne peuvent pas pénétrer dedans. Ils la rejettent, comme ils tournent le bouton de la T.V. au moment des discours politiques. Ce sont des sages.
    (La charrette bleue, p.121, Denoël)
     
  73. Mais arracher des enfants à leur activité normale, qui est celle de l'agitation inutile et joyeuse, pour les enfermer entre quatre murs où pendant des années on leur empile dans le crâne des notions abstraites, c'est la torture la plus masochiste que l'homme ait inventée contre lui-même.
    (La charrette bleue, p. 145, Denoël )
     
  74. Les grands mathématiciens doivent avoir dans leur cerveau les mêmes circonvolutions-antennes, capteuses de lumière invisible, que les grands poètes.
    (La charrette bleue, p. 230, Denoël)
     
  75. La raison rétrécit la vie, comme l'eau rétrécit la laine, si bien qu'on s'y sent coincé et on ne peut plus lever les bras.
    (L'Enchanteur, p. 43, Denoël)
     
  76. Ce qui s'apprend sans peine ne vaut rien et ne demeure pas.
    ( L'Enchanteur, p.82, Denoël)
     
  77. Mais si le Diable parle parfois, Dieu se tait, toujours. Il faut trouver les réponses seul.
    (L'Enchanteur, p.143, Denoël)
     
  78. Le mieux est de faire de son mieux... Quand viendra le moment de ne plus rien faire je serai heureux d'être arrivé au bout de ma tâche...
    (L'Enchanteur, p.178, Denoël)
     
  79. Ce que je sais n'est pas forcément ce que tu pourrais découvrir, dit Merlin. Le mieux est d'y aller voir.
    (L'Enchanteur, p.190, Denoël)
     
  80. Il est des morceaux de temps sur lesquels je ne peux rien. Ni Dieu non plus. Il lui a fallu sept jours pour créer le monde.
    (L'Enchanteur, p.194, Denoël)
     
  81. Faut réfléchir avant de faire le bien! Faut être sûr que c'est un bon bien!
    (L'Enchanteur, p.207, Denoël)
     
  82. Les amants inventent leur propre vocabulaire, mais il n'a de signification que pour eux.
    (L'Enchanteur, p. 254, Denoël)