Walter Benjamin
1892-1940
  1. Toute passion, certes, confine au chaos, la passion du collectionneur, en ce qui la regarde, confine au chaos des souvenirs.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.42, Rivages poche, n°320)
     
  2. C'est le plus profond enchantement du collectionneur que d'enclore l'exemplaire dans un cercle envoûté où, parcouru de l'ultime frisson, celui d'avoir été acquis, il se pétrifie. Tout ce qui relève là de la mémoire, de la pensée, de la conscience, devient socle, cadre, reposoir, fermoir de sa possession. L'époque, le paysage, l'artisanat, le propriétaire dont provient ledit exemplaire, tout cela se rassemble aux yeux du vrai collectionneur en chacune de ses possessions, pour composer une encyclopédie magique dont la quintessence n'est autre que le destin de son projet.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.43, Rivages poche, n°320)
     
  3. [...] le destin clé de tout exemplaire, c'est la rencontre avec lui-même, avec sa propre collection.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.44, Rivages poche, n°320)
     
  4. Renouveler le monde - c'est là l'instinct le plus profond dans le désir qu'éprouve le collectionneur d'acquérir de nouveaux objets, et voilà pourquoi le collectionneur de livres anciens se trouve plus près de la source de tout acte de collection que l'amateur de nouvelles éditions pour bibliophiles.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.44, Rivages poche, n°320)
     
  5. Parmi toutes les façons de se procurer des livres, la plus glorieuse, considère-t-on, est de les écrire soi-même. [...] Les écrivains sont effectivement des gens qui écrivent des livres non par pauvreté, mais par insatisfaction envers ceux qu'ils pourraient acheter mais qui ne leur plaisent point.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.44, Rivages poche, n°320)
     
  6. Les collectionneurs sont des individus pourvus d'instinct tactique ; d'après leur expérience, lorsqu'ils conquièrent une ville étrangère, le magasin de livres anciens le plus minuscule peut signifier un fort, la papeterie la plus éloignée une position clé. Combien de villes ne se sont-elles pas ouvertes devant moi au cours des marches avec lesquelles je partais à la conquête de livres.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.47, Rivages poche, n°320)
     
  7. Pour le collectionneur de livres, en effet, la vraie liberté de tous les livres se trouve quelque part sur ses propres rayons.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel, p.49, Rivages poche, n°320)
     
  8. Une collection a pour plus beau titre de noblesse de pouvoir se léguer.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.54, Rivages poche, n°320)
     
  9. C'est seulement à l'heure où il s'éteint que le collectionneur est compris.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.54, Rivages poche, n°320)
     
  10. Souvent, il y a un embarras, discret, à l'origine de la réussite.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.65, Rivages poche, n°320)
     
  11. [...] la fascination des mots croisés, ce « golf avec des vocables » [...]
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.87, Rivages poche, n°320)
     
  12. [...] nous partons du monde de nos repères, auquel les mots croisés correspondent si bien, architectures normées, schémas de la statistique, langage univoque de nos réclames lumineuses et de nos signaux de circulation.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.88, Rivages poche, n°320)
     
  13. [...] il ne saurait se former le sens de l'art en qui ne possède pas au moins une belle chose à lui.
    (Je déballe ma bibliothèque, trad. Philippe Ivernel , p.137, Rivages poche, n°320)