Citations ajoutées le 24 juin 2004

Eric-Emmanuel Schmitt

  1. La Terre n'est ni ronde, ni plate, Guilden. Elle est rectangulaire, de la taille d'un écran, et elle tourne lorsqu'on appuie sur une touche; on s'y déplace sur le dos d'un curseur, à la vitesse de la lumière, et l'homme n'est qu'un point lumineux.
    (Golden Joe [Joe], in Théâtre 2 p.11, Livre de Poche, n°15599)
     
  2. Vous vous comportez comme un vieux : vous avancez à pas comptés, vous prenez des assurances, vous équilibrez vos risques ... vous manquez singulièrement d'inexpérience
    (Golden Joe [Joe], in Théâtre 2 p.12, Livre de Poche, n°15599)
     
  3. [...] il n'y a rien de plus inflammable que l'opinion publique.
    (Golden Joe [Weston], in Théâtre 2 p.42, Livre de Poche, n°15599)
     
  4. C'est la vie, tuer, c'est dans l'ordre... On tue les pauvres en étant riche, on tue les vieux en étant jeune, on pousse ses parents lentement vers la tombe... Pas de vie réussie sans cadavres, les fleurs poussent sur de la charogne... c'est dans l'ordre...
    (Golden Joe [Meg], in Théâtre 2 p.61, Livre de Poche, n°15599)
     
  5. Une mère peut-elle dire à son fils que plus tard il souffrira, qu'il aimera sans être aimé, humilié, bafoué, détesté, méprisé, seul, perdu ?... Quelle mère voudra dire à son fils qu'il sortira de la vie comme un vaincu, battu par le temps et détruit par la mort... Y a-t-il une mère qui, lorsqu'elle tient ce petit bout de chair rose contre elle, lorsqu'elle regarde ces grands yeux clairs qui ne voient que depuis quelques jours, y a-t-il une mère qui a le courage d'annoncer l'avenir et son cortège d'horreurs ? Le premier acte d'amour d'une mère est le mensonge.
    (Golden Joe [Meg], in Théâtre 2 p.63, Livre de Poche, n°15599)
     
  6. Notre père le Dollar,
    Que votre cours soit respecté,
    Que votre règne dure.
    Donnez-nous aujourd'hui notre vision du jour,
    Effacez nos crédits comme nous le réclamons à tous nos débiteurs,
    Et délivrez-nous des pauvres.
    Amen.

    (Golden Joe [Cecily], in Théâtre 2 p.72, Livre de Poche, n°15599)
     
  7. On ne tue pas la misère avec la charité. Au contraire ça la fortifie.
    (Golden Joe [Guilden], in Théâtre 2 p.101, Livre de Poche, n°15599)
     
  8. C'est ça la vraie misère, monsieur, c'est l'envie.
    (Golden Joe [Arthur], in Théâtre 2 p.109, Livre de Poche, n°15599)
     

Michael Connelly

  1. La peur, c'est vrai, jamais ne dort.
    (Créance de sang, trad. Robert Pépin, p.415, Seuil Policier, 1999)
     
  2. [...] il n'est pas de meilleur moyen de mentir que d'en rajouter sur la vérité [...]
    (Créance de sang, trad. Robert Pépin, p.440, Seuil Policier, 1999)
     

  
Gaston Bachelard

  1. Rendre géométrique la représentation, c'est-à-dire dessiner les phénomènes et ordonner en série les événements décisifs d'une expérience, voilà la tâche où s'affirme l'esprit scientique.
    (La formation de l'esprit scientifique [Incipit], p.5, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  2. La science de la réalité ne se contente plus du comment phénoménologique ; elle cherche le pourquoi mathématique.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.5, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  3. Il y a si loin du livre imprimé au livre lu, si loin du livre lu au livre compris, assimilé, retenu ! Même chez un esprit clair, il y a des zones obscures, des cavernes où continuent à vivre des ombres. Même chez l'homme nouveau, il reste des vestiges du vieil homme. En nous, le XVIIIe siècle continue sa vie sourde : il peut - hélas - réapparaître.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.7, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  4. [...] on ne peut se prévaloir d'un esprit scientifique tant qu'on n'est pas assuré, à tous les moments de la vie pensive, de reconstruire tout son savoir. Seuls les axes rationnels permettent ces reconstructions. Le reste est basse mnémotechnie. La patience de l'érudition n'a rien à voir avec la patience scientifique.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.7, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  5. On tient beaucoup à ce qu'on a péniblement acquis.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.7, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  6. Donner et surtout garder un intérêt vital à la recherche désintéressée, tel n'est-il pas le premier devoir de l'éducateur, à quelque stade de la formation que ce soit ?
    (La formation de l'esprit scientifique, p.9, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  7. [...] la science est l'esthétique de l'intelligence.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.10, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  8. La connaissance du réel est une lumière qui projette toujours quelque part des ombres. Elle n'est jamais immédiate et pleine. Les révélations du réel sont toujours récurrentes. Le réel n'est jamais « ce qu'on pourrait croire » mais il est toujours ce qu'on aurait dû penser. La pensée empirique est claire, après coup, quand l'appareil des raisons a été mis au point. En revenant sur un passé d'erreurs, on trouve la vérité en un véritable repentir intellectuel. En fait, on connaît contre une connaissance antérieure, en détruisant des connaissances mal faites, en surmontant ce qui, dans l'esprit même, fait obstacle à la spiritualisation.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.13, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  9. Face au réel, ce qu'on croit savoir clairement offusque ce qu'on devrait savoir. Quand il se présente à la culture scientifique, l'esprit n'est jamais jeune. Il est même très vieux, car il a l'âge de ses préjugés. Accéder à la science, c'est, spirituellement, rajeunir, c'est accepter une mutation brusque qui doit contredire un passé.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.14, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  10. L'opinion pense mal ; elle ne pense pas : elle traduit des besoins en connaissances. En désignant les objets par leur utilité, elle s'interdit de les connaître. On ne peut rien fonder sur l'opinion : il faut d'abord la détruire. Elle est le premier obstacle à surmonter. Il ne suffirait pas, par exemple, de la rectifier sur des points particuliers, en maintenant, comme une sorte de morale provisoire, une connaissance vulgaire provisoire. L'esprit scientifique nous interdit d'avoir une opinion sur des questions que nous ne comprenons pas, sur des questions que nous ne savons pas formuler clairement. Avant tout, il faut savoir poser des problèmes. Et quoi qu'on dise, dans la vie scientifique, les problèmes ne se posent pas d'eux-mêmes. C'est précisément ce sens du problème qui donne la marque du véritable esprit scientifique. Pour un esprit scientifique, toute connaissance est une réponse à une question. S'il n'y a pas eu de question, il ne peut y avoir connaissance scientifique. Rien ne va de soi. Rien n'est donné. Tout est construit.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.14, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  11. « Notre esprit, dit justement M. Bergson [in La Pensée et le Mouvant, Paris, 1934, p. 231] a une irrésistible tendance à considérer comme plus claire l'idée qui lui sert le plus souvent. » [...] Il vient un temps où l'esprit aime mieux ce qui confirme son savoir que ce qui le contredit, où il aime mieux les réponses que les questions. Alors l'instinct conservatif domine, la croissance spirituelle s'arrête.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.15, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  12. [...] c'est verser dans un vain optimisme que de penser que savoir sert automatiquement à savoir, que la culture devient d'autant plus facile qu'elle est plus étendue, que l'intelligence enfin, sanctionnée par des succès précoces, par de simples concours universitaires, se capitalise comme une richesse matérielle. En admettant même qu'une tête bien faite échappe au narcissisme intellectuel si fréquent dans la culture littéraire, dans l'adhésion passionnée aux jugements du goût, on peut sûrement dire qu'une tête bien faite est malheureusement une tête fermée. C'est un produit d'école.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.15, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  13. [...] l'homme animé par l'esprit scientifique désire sans doute savoir, mais c'est aussitôt pour mieux interroger.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.16, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  14. L'historien des sciences doit prendre les idées comme des faits. L'épistémologue doit prendre les faits comme des idées, en les insérant dans un système de pensées. Un fait mal interprété par une époque reste un fait pour l'historien. C'est, au gré de l'épistémologue, un obstacle, c'est une contre-pensée.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.17, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  15. Dans l'éducation, la notion d'obstacle pédagogique est également méconnue. J'ai souvent été frappé du fait que les professeurs de sciences, plus encore que les autres si c'est possible, ne comprennent pas qu'on ne comprenne pas. Peu nombreux sont ceux qui ont creusé la psychologie de l'erreur, de l'ignorance et de l'irréflexion. [...] Les professeurs de sciences imaginent que l'esprit commence comme une leçon, qu'on peut toujours refaire une culture nonchalante en redoublant une classe, qu'on peut faire comprendre une démonstration en la répétant point pour point. Ils n'ont pas réfléchi au fait que l'adolescent arrive dans la classe de Physique avec des connaissances empiriques déjà constituées : il s'agit alors, non pas d'acquérir une culture expérimentale, mais bien de changer de culture expérimentale, de renverser les obstacles déjà amoncelés par la vie quotidienne.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.18, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  16. Au cours d'une carrière déjà longue et diverse, je n'ai jamais vu un éducateur changer de méthode d'éducation. Un éducateur n'a pas le sens de l'échec précisément parce qu'il se croit un maître. Qui enseigne commande.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.19, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  17. Il est si doux à la paresse intellectuelle d'être cantonnée dans l'empirisme, d'appeler un fait un fait et d'interdire la recherche d'une loi !
    (La formation de l'esprit scientifique, p.30, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  18. Une science qui accepte les images est, plus que toute autre, victime des métaphores. Aussi l'esprit scientifique doit-il sans cesse lutter contre les images, contre les analogies, contre les métaphores.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.38, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  19. Mieux vaudrait une ignorance complète qu'une connaissance privée de son principe fondamental.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.40, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  20. Le P. Louis Castel disait fort bien [in L'Optique des couleurs] : « La méthode des faits, pleine d'autorité et d'empire, s'arroge un air de divinité qui tyrannise notre créance, et impose à notre raison. Un homme qui raisonne, qui démontre même, me prend pour un homme : je raisonne avec lui ; il me laisse la liberté du jugement ; et ne me force que par ma propre raison. Celui qui crie voilà un fait, me prend pour un esclave. »
    (La formation de l'esprit scientifique, p.41, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  21. Au spectacle des phénomènes les plus intéressants, les plus frappants, l'homme va naturellement avec tous ses désirs, avec toutes ses passions, avec toute son âme. On ne doit donc pas s'étonner que la première connaissance objective soit une première erreur.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.54, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  22. Une connaissance générale est presque fatalement une connaissance vague.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.72, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  23. Ce qui est occulte est enfermé.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.98, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  24. On pense comme on voit, on pense ce qu'on voit : une poussière colle à la paroi électrisée, donc l'électricité est une colle, une glue.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.103, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  25. L'imagination travaille en dépit des oppositions de l'expérience. On ne se détache pas du merveilleux quand une fois on lui a donné sa créance, et pendant longtemps on s'acharne à rationaliser la merveille plutôt qu'à la réduire.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.108, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  26. [...] moins une idée est précise et plus on trouve de mots pour l'exprimer. Au fond, le progrès de la pensée scientifique revient à diminuer le nombre des adjectifs qui conviennent à un substantif et non point à l'augmenter. On pense scientifiquement des attributs en les hiérarchisant et non pas en les juxtaposant.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.112, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  27. [...] cet optimisme récurrent des historiens des sciences qui veulent souvent plaquer sur les découvertes anciennes les valeurs nouvelles.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.123, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  28. Le signe premier de la certitude scientifique, c'est qu'elle peut être revécue aussi bien dans son analyse que dans sa synthèse.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.133, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  29. Mme Metzger écrit justement [in Les Doctrines chimiques en France] : « Les passions n'agiraient pas longtemps dans le même sens si elles ne rencontraient quelque complice dans l'esprit de ceux qui se laissent séduire par elles. ». On peut, en d'autres occasions, inverser très exactement le rapport et dire « la pensée n'agirait pas longtemps dans le même sens si elle ne rencontrait quelque complice dans les passions de ceux qui se laissent guider par les lumières de la pensée ».
    (La formation de l'esprit scientifique, p.145, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  30. Dans le domaine de la culture intellectuelle, plus la faute est récente, et plus le péché est grave...
    (La formation de l'esprit scientifique, p.155, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  31. Aux hommes les plus cultivés, il suffit parfois d'un commencement ou d'un prétexte de rationalisation pour accepter la « science » de la baguette magique.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.165, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  32. On ne critique pas la technique de ses pères.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.175, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  33. C'est aimer profondément que d'aimer des qualités contradictoires.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.181, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  34. On ne peut penser longtemps à un mystère, à une énigme, à une entreprise chimérique, sans en sexualiser, d'une manière plus ou moins sourde, le principe et les péripéties.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.185, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  35. [...] des absurdités cohérentes.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.185, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  36. La désillusion de l'enfant toujours déçu par l'intérieur du polichinelle n'a d'égale que la désillusion de l'amoureux quand il connaît sa maîtresse.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.193, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  37. [...] deux interlocuteurs, qui s'entretiennent en apparence d'un objet précis, nous renseignent plus sur eux-mêmes que sur cet objet.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.193, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  38. Dans un travail monotone - et tout travail instruit est monotone - l'home faber ne fait pas de géométrie, il fait des vers.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.194, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  39. Une philosophie n'est pas cohérente par son objet ; elle n'a comme cohésion que la communauté des valeurs affectives de l'auteur et du lecteur.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.203, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  40. On le voit, c'est l'homme tout entier avec sa lourde charge d'ancestralité et d'inconscience, avec toute sa jeunesse confuse et contingente, qu'il faudrait considérer si l'on voulait prendre la mesure des obstacles qui s'opposent à la connaissance objective, à la connaissance tranquille. Hélas ! les éducateurs ne travaillent guère à donner cette tranquillité ! Partant, ils ne guident pas les élèves vers la connaissance de l'objet. Ils jugent plus qu'ils n'enseignent ! Ils ne font rien pour guérir l'anxiété qui saisit tout esprit devant la nécessité de corriger sa propre pensée et de sortir de soi pour trouver la vérité objective.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.209, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  41. L'excès de précision, dans le règne de la quantité, correspond très exactement à l'excès du pittoresque, dans le règne de la qualité. La précision numérique est souvent une émeute de chiffres, comme le pittoresque est, pour parler comme Baudelaire, « une émeute de détails ».
    (La formation de l'esprit scientifique, p.212, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  42. Il faut réfléchir pour mesurer et non pas mesurer pour réfléchir.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.213, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  43. Mais l'enseignement des résultats de la science n'est jamais un enseignement scientifique. Si l'on n'explicite pas la ligne de production spirituelle qui a conduit au résultat, on peut être sûr que l'élève combinera le résultat avec ses images les plus familières. Il faut bien « qu'il comprenne ». On ne peut retenir qu'en comprenant. L'élève comprend à sa manière.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.234, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  44. Dis-moi ce que tu vois et je te dirai ce que c'est.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.241, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  45. Ce n'est pas en pleine lumière, c'est au bord de l'ombre que le rayon en se diffractant, nous confie ses secrets.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.241, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  46. [...] il faut comprendre que le microscope est une prolongement de l'esprit plutôt que de l'oeil. Ainsi la précision discursive et sociale fait éclater les insuffisances intuitives et personnelles. Plus une mesure est fine, plus elle est indirecte. La science du solitaire est qualitative. La science socialisée est quantitative.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.242, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  47. Et murmurons à notre tour, tout entier à la vie intellectuelle : erreur, tu n'es pas un mal.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.243, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  48. Qui est enseigné doit enseigner. Une instruction qu'on reçoit sans la transmettre forme des esprits sans dynamisme, sans autocritique.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.244, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  49. Il ne suffit point à l'homme d'avoir raison, il faut qu'il ait raison contre quelqu'un. Sans l'exercice social de sa conviction rationnelle, la raison profonde n'est pas loin d'être une rancune.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.245, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  50. [...] il court toujours un jeu de nuances philosophiques sur un enseignement vivant : un enseignement reçu est psychologiquement un empirisme ; un enseignement donné est psychologiquement un rationalisme. Je vous écoute : je suis tout ouïe. Je vous parle : je suis tout esprit. Même si nous disons la même chose, ce que vous dites est toujours un peu irrationnel ; ce que je dis est toujours un peu rationnel. Vous avez toujours un peu tort, et j'ai toujours un peu raison. La matière enseignée importe peu. L'attitude psychologique faite, d'une part, de résistance et d'incompréhension, d'autre part, d'impulsion et d'autorité, devient l'élément décisif dans l'enseignement réel, quand on quitte le livre pour parler aux hommes.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.246, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  51. Balzac disait que les célibataires remplacent les sentiments par les habitudes. De même, les professeurs remplacent les découvertes par des leçons. Contre cette indolence intellectuelle qui nous prive peu à peu de notre sens des nouveautés spirituelles, l'enseignement des découvertes le long de l'histoire scientifique est d'un grand secours. Pour apprendre aux élèves à inventer, il est bon de leur donner le sentiment qu'ils auraient pu découvrir.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.247, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  52. Ce qui sert la vie l'immobilise. Ce qui sert l'esprit le met en mouvement.
    (La formation de l'esprit scientifique, p.251, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)
     
  53. Alors oui, l'École continue tout le long d'une vie. Une culture bloquée sur un temps scolaire est la négation même de la culture scientifique. Il n'y a de science que par une École permanente. C'est cette école que la science doit fonder. Alors les intérêts sociaux seront définitivement inversés : la Société sera faite pour l'École et non pas l'École pour la Société.
    (La formation de l'esprit scientifique [Excipit], p.252, Librairie Philosophique J. Vrin, 1970)