Giuseppe Ungaretti
1888-1970
  1. Et peut-être suis-je seul
    à savoir encore
    qu'il a vécu.

    (Vie d'un homme, [In memoriam] p.34, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  2. Une nuit entière
    jeté à côté
    d'un camarade
    massacré
    sa bouche
    grinçante
    tournée à la pleine lune
    ses mains congestionnées
    entrées
    dans mon silence
    j'ai écrit
    des lettres pleines d'amour

    Je n'ai jamais été
    plus
    attaché à la vie.

    (Vie d'un homme, trad. Jean Lescure, p.38, [Veillée] nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  3. J'ai été
    une flaque de ténèbres

    À cette heure je mords
    l'espace
    comme un enfant la mamelle

    À cette heure je suis saoul
    d'univers.

    (Vie d'un homme, [La nuit belle] p.64, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  4. Avec la mer
    je me suis fabriqué
    un cercueil
    de fraîcheur

    (Vie d'un homme, [Univers] p.65, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  5. Lorsque je trouve
    dans mon silence
    une parole
    elle est creusée dans ma vie
    comme un abîme

    (Vie d'un homme, [Congé] p.74, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  6. Je m'éblouis
    d'infini

    (Vie d'un homme, [Matin] p.80, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  7. Comme un nuage
    Je me filtre
    au soleil

    (Vie d'un homme, [Transfiguration] p.85, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  8. Je me reconnais
    image
    passagère

    Prise dans un cycle
    immortel.

    (Vie d'un homme, [Sérénité] p.101, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  9. On est là comme
    sur les arbres
    les feuilles
    d'automne.

    (Vie d'un homme, [Soldats] p.102, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  10. Mais la nuit disperse les distances.
    (Vie d'un homme, [O Nuit] p.115, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  11. Le véritable amour est une quiétude en flamme
    (Vie d'un homme, [Silence en Ligurie] p.122, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  12. Temps, fugace frisson...
    (Vie d'un homme, [Lac Lune Aurore Nuit] p.129, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  13. L'homme, monotone monde,
    Croit agrandir son empire
    Et de ses fiévreuses mains
    Ne sortent jamais que des bornes.

    (Vie d'un homme, [La Pitié] p.180, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  14. Poètes, poètes, nous aurons
    Mis tous les masques ;
    Mais on n'est jamais que soi-même.

    (Vie d'un homme, [Petit monologue] p.264, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     
  15. Durât-il une éternité, ce voyage n'aurait duré qu'un instant :
    Voici la mort, arrivée de peu la première.

    Un atome tranché : la vie terrestre n'est rien de plus.
    (Vie d'un homme, [Ultimes Choeurs pour la Terre Promise] p.281, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)
     

  16. L'amour n'est plus cette tempête
    Dans l'éblouissement nocturne
    Qui m'enchaînait naguère encore
    Entre l'insomnie et délire.

    Il est l'éclair de ce phare
    Vers quoi le vieux capitaine
    Avance, calmement.

    (Vie d'un homme, [Ultimes Choeurs pour la Terre Promise] p.288, nrf/Poésie/Éditions de Minuit-Gallimard, 1998)