Victor Cherbuliez
1829-1899
  1. [...] Olivier fit la réflexion que le monde est encore plus redoutable qu'il ne l'avait pensé, que le monde est à la fois un grand tentateur et un austère moraliste, qu'il veut qu'on se donne à lui et qu'il méprise ceux qui se donnent, qu'il leur prend leur vertu et leur reproche de l'avoir perdue.
    (Olivier Maugant, p. 12, Hachette, 1885)
     
  2. La mort est de toutes les choses qui ne se comprennent pas celle que la jeunesse comprend le moins.
    (Olivier Maugant, p. 55, Hachette, 1885)
     
  3. Le don fatal de l'éloquence, de celle qui consiste à communiquer aux autres les convictions qu'on n'a pas.
    (Olivier Maugant, p. 107, Hachette, 1885)
     
  4. Le pessimiste est un homme qui s'indigne de ce que l'univers n'est pas un immense magasin de bonheur à son usage.
    (Olivier Maugant, p. 137, Hachette, 1885)
     
  5. Si aujourd'hui le pessimisme est à la mode, c'est que, faute de grandes choses à aimer, on s'aime beaucoup soi-même. La fatuité est une religion triste.
    (Olivier Maugant, p. 138, Hachette, 1885)
     
  6. Le peuple fête les chagrins comme les bonheurs, et la répétition ne le fatigue jamais.
    (Olivier Maugant, p. 315, Hachette, 1885)
     
  7. Ce sont les minorités qui gouvernent le monde, et c'est pour cela que le monde a une histoire ; si la vraie majorité gouvernait, il ne se passerait jamais rien.
    (Olivier Maugant, p. 330, Hachette, 1885)
     
  8. [...] jamais nos illusions ne nous sont plus précieuses que quand nous sommes en danger de les perdre.
    (Olivier Maugant, p. 357, Hachette, 1885)
     
  9. Comme les grands seigneurs en voyage, les événements envoient devant eux des courriers pour annoncer leur arrivée.
    (Olivier Maugant, p. 378, Hachette, 1885)
     
  10. Il est plus facile d'inspirer l'horreur de la guerre à ceux qui reçoivent les coups qu'à ceux qui les donnent.
    (Profils étrangers, p.279, Hachette, 1889)
     
  11. L'homme supérieur est celui qui fait bien son métier tout en sachant faire autre chose.
    (Meta Holdenis, p.41, Hachette, 1873)
     
  12. Il y a de grosses choses que les gens fins ne voient pas.
    (Olivier Maugant, p.295, Hachette, 1885)
     
  13. Dans nos adversités, le monde ne nous fait grâce de rien ; il pardonne tout aux habiles, c'est sur les maladroits qu'il venge la morale offensée.
    (Olivier Maugant, p.320, Hachette, 1885)
     
  14. [...] Après avoir vécu tant bien que mal, il n'est pas désagréable d'employer quelques dix années à regarder vivre les autres, en riant sous cape de leurs sottises, et en se disant : « Je n'en fais plus, mais je les comprends toutes. »
    (Amours fragiles (Le roi Apépi), p.5, Hachette, 1880)
     
  15. Nous naissons tous avec un certain fond de folie à dépenser ; heureux qui le dépense en détail dans sa jeunesse !
    (Amours fragiles (Le roi Apépi), p.31, Hachette, 1880)
     
  16. Ceux qui regardent la disette d'argent comme le pire des maux [...] sont des insensés ; il y a un mal plus insupportable : c'est la pénurie des désirs [...].
    (Après fortune faite, p.196, Hachette, 1896)
     
  17. Les questions d'argent [...] commencent toujours par être délicates et finissent quelquefois par être indélicates.
    (Prosper Randoce, p.122, Hachette, 1882)
     
  18. Le catholicisme se recommande à nous par sa durée, et il a l'évidence, la majesté ou, si [vous]1 l'aimez mieux, la brutalité d'un fait. La philosophie est la raison contente ; le protestantisme est une raison mécontente, qui se donne beaucoup de mal pour remplacer ce qu'elle a perdu.
    1Manque dans le texte.

    (La vocation du comte Ghislain, p.16, Hachette, 1888)
     
  19. Les chiens nous aiment trop [...]. Ce qui me plaît dans les chats, c'est qu'ils nous rendent justice en nous aimant dans la mesure où nous méritons d'être aimés.
    (La vocation du comte Ghislain, p.57, Hachette, 1888)
     
  20. Les hommes, je parle des plus subtils, résument tout ; c'est le gros de l'affaire qui les intéresse. Les femmes seules savent le prix d'un détail.
    (Le roman d'une honnête femme, p.7, Hachette, 1876)
     
  21. [...] Il est bon qu'avant de se marier, un homme ait épuisé la liste de ses curiosités. Ce sont les curieux du lendemain qui font les mauvais maris.
    (Le roman d'une honnête femme, p.28, Hachette, 1876)
     
  22. [...] Une idée, cela nourrit, cela désaltère, cela tient chaud en hiver, cela rafraîchit dans les chaleurs, et puis cela a des yeux, une bouche, une langue, cela parle, cela rit, c'est une compagnie.
    (L'idée de Jean Têterol, p.13, Hachette, 1878)
     
  23. [...] L'homme qui n'a pas de besoins devient tôt ou tard le maître de ceux qui en ont.
    (L'idée de Jean Têterol, p.20, Hachette, 1878)
     
  24. Toutes les vaches se ressemblent ; elles portent toutes dans leurs yeux quelque chose de fixe et d'éternel, un rêve silencieux d'herbe fraîche.
    (L'idée de Jean Têterol, p.34, Hachette, 1878)
     
  25. [...] Le plus admirable médecin est la nature, parce qu'elle guérit les trois quarts des maladies et qu'elle ne dit jamais de mal de ses confrères.
    (Noirs et rouges, p.51, Hachette, 1882)
     
  26. La musique est un art qui dit ce qu'aucune langue ne peut dire ; il y a dans l'âme humaine des profondeurs qui se taisent, elle prête une voix à leur silence, et nous connaissons par elle ce je ne sais quoi qui est en nous et qui ne parle pas.
    (Noirs et rouges, p.198, Hachette, 1882)
     
  27. Qu'est-ce qu'un jardin ? C'est la nature convertie de force à la géométrie.
    (L'art et la nature, p.221, Hachette, 1892)