Citations ajoutées le 1er décembre 2008

Lucien Arréat

  1. Nos défauts et nos qualités se tiennent. Affaire de degré et de moment. Un vice, a-t-on dit, c'est de la vertu mal employée.
    (Réflexions et maximes, p.52, Félix Alcan, 1911)
     
  2. Il faut savoir faire à  temps ce qu'on aura le devoir de faire un jour.
    (Réflexions et maximes, p.52, Félix Alcan, 1911)
     
  3. On se flatte de laisser sa faute derrière soi, mais on la retrouve devant soi.
    (Réflexions et maximes, p.52, Félix Alcan, 1911)
     
  4. Combien d'hommes se dispensent d'un devoir par une grimace !
    (Réflexions et maximes, p.52, Félix Alcan, 1911)
     
  5. Celui-ci abat la tête d'un jeune sapin ; celui-là  endommage l'écorce d'un chêne. Pour l'amusement d'une seconde, on anéantit une utilité de plusieurs siècles.
    (Réflexions et maximes, p.53, Félix Alcan, 1911)
     
  6. On nous prà´ne sur nos théâtres une nouvelle morale de l'amour : elle ne serait que la vieille permission de l'impudicité.
    (Réflexions et maximes, p.53, Félix Alcan, 1911)
     
  7. Conforme à  la nature, contre la nature : expressions commodes et vagues. Est-ce que toute vertu n'est pas, à  quelque degré, un effort sur notre nature ?
    (Réflexions et maximes, p.53, Félix Alcan, 1911)
     
  8. On dénonce l'inégal avancement de la science et de la moralité. C'est que la science a nos passions pour complices ; et la morale, pour antagonistes.
    (Réflexions et maximes, p.53, Félix Alcan, 1911)
     
  9. Les lois ne sont pas l'expression de droits absolus ou de devoirs mystérieux ; elles sont des compromis entre des intérêts opposés.
    (Réflexions et maximes, p.54, Félix Alcan, 1911)
     
  10. Les devoirs naissent de la vie sociale ; l'obligation se fonde sur l'habitude. Ne négligeons donc rien de ce qui aide à  former cette habitude !
    (Réflexions et maximes, p.54, Félix Alcan, 1911)
     
  11. L'acte de foi qui donne leur force aux religions a pris naissance en des circonstances historiques qu'il n'est pas possible de répéter artificiellement. De là , la difficulté d'une morale indépendante du dogme. N'ayant pas le moyen de créer la foi qui la ferait vivre, il nous faut recourir aux démonstrations de la raison : trop fragile appui auprès de la majorité des hommes !
    (Réflexions et maximes, p.54, Félix Alcan, 1911)
     
  12. Une morale sans obligation ni sanction se discute, elle ne s'enseigne pas.
    (Réflexions et maximes, p.54, Félix Alcan, 1911)
     
  13. En morale, l'habitude crée une sorte de foi, l'action retentissant, à  chaque coup, sur notre raison.
    (Réflexions et maximes, p.54, Félix Alcan, 1911)
     
  14. L'habitude peut prendre la force d'une contrainte morale : mais elle n'arriverait guère à  s'imposer, si elle n'était soutenue par le châtiment, qu'il vienne des hommes ou de la nature.
    (Réflexions et maximes, p.55, Félix Alcan, 1911)
     
  15. Si inégalement que se répartissent les effets de nos actes, la vie nous offre une moyenne de réactions qui sont une sorte de réalité morale, analogue aux réalités physiques, et les règles de la moralité se fondent au moins sur la constance de ces réactions, à  défaut d'une autre origine.
    (Réflexions et maximes, p.55, Félix Alcan, 1911)
     
  16. La moralité se conserve, comme elle se forme, par le jeu de nos tendances profondes, de nos intérêts, de nos passions, de nos désirs... Le tout n'est pas d'affirmer quelques principes ; il s'agit d'en régler l'application, qui offre bien des cas possibles. En morale comme en politique, la vie crée, la philosophie commente.
    (Réflexions et maximes, p.55, Félix Alcan, 1911)
     
  17. Nous pouvons vouloir que notre vie ait une valeur morale, mais nous ne pouvons pas faire que la morale que nous concevons soit la destination de la vie elle-même. Imposer à  notre vie une certaine fin, et vouloir que cette fin soit celle de la nature, ce sont là  deux situations très différentes et qu'il ne faut pas confondre.
    (Réflexions et maximes, p.56, Félix Alcan, 1911)
     
  18. Comment faire même, dans le domaine des moeurs, le juste départ de ce qui demeure et de ce qui change ?
    (Réflexions et maximes, p.56, Félix Alcan, 1911)
     
  19. Le sentiment, c'est-à -dire cet ensemble si complexe de tendances acquises ou héritées, d'émotions, de pensées, de volontés, qui sont le fond de nous-mêmes : point de mot plus vague, et point d'état plus réel. S'il était possible d'en faire pour chacun de nous l'histoire et l'analyse, quelle lumière en rejaillirait sur tant de questions où la philosophie s'embrouille, sur la nature et l'origine des idées religieuses et des idées morales, sur les conflits de l'individu et de la société !
    (Réflexions et maximes, p.56, Félix Alcan, 1911)
     
  20. Comment ne pas sourire de la prétention des gens d'école à  changer le cours du monde, et peut-être aussi le coeur de l'homme, selon qu'ils ont assigné tel ou tel principe à  la conduite et arrangé à  leur mode les événements moraux ? Qu'il nous plaise à  nous, philosophes de cabinet, d'invoquer l'égoïsme ou l'altruisme, le désir de puissance ou la sympathie, l'utilité ou le bonheur, le plaisir du risque ou l'impératif catégorique, nous n'aurons refait pour cela ni l'âme humaine ni les conditions de l'existence. Nos doctrines restent dans l'abstrait ; la vie réelle, la vie vécue ne les connaît pas.
    (Réflexions et maximes, p.57, Félix Alcan, 1911)
     
  21. Les véritables révolutionnaires, en morale, ce ne sont pas les théoriciens, mais les hommes d'entreprise.
    (Réflexions et maximes, p.57, Félix Alcan, 1911)
     
  22. La grande affaire est de vivre : il faut bien que tous nos systèmes s'en arrangent.
    (Réflexions et maximes, p.57, Félix Alcan, 1911)
     
  23. Bons moralistes, il ne sert de rien d'attacher la chèvre, si le piquet ne tient pas.
    (Réflexions et maximes, p.58, Félix Alcan, 1911)
     
  24. Quel troublant spectacle que celui de ce criminel qui se repent et livre sa tête au bourreau sans une plainte ! La loi qui l'épargnerait lui serait peut-être aussi cruelle que la peine qui le frappe.
    (Réflexions et maximes, p.58, Félix Alcan, 1911)
     
  25. Nulle peinture, fût-ce la Vengeance céleste poursuivant le Crime1, ne remplacera la figure du Christ dans nos prétoires. Elle signifiait à  la fois l'expiation et le pardon. Nous frappons, mais nous ne pardonnons plus.
    1Prudhon.

    (Réflexions et maximes, p.58, Félix Alcan, 1911)
     
  26. La pénalité s'était adoucie sous l'influence du sentiment, à  la faveur du « moralisme » chrétien ou métaphysique. Cette garde étant tombée, une réaction en sens contraire s'annonce ; la sévérité des peines redeviendra, pour un temps, une condition d'existence des sociétés nouvelles.
    (Réflexions et maximes, p.58, Félix Alcan, 1911)
     
  27. Quel mélange singulier de sentiment et d'inconscience, de vouloir et de fatum, dans les événements humains !
    (Réflexions et maximes, p.59, Félix Alcan, 1911)
     
  28. Ne nous laissons pas aller à  disputer sur ces mots, le bien, le mal, expressions trop abrégées de la réalité vivante. « Pourquoi le mal, pourquoi la mort ? » s'écrie le poète. Autant demander : « Pourquoi quelque chose ? » Mais cela n'a point de sens.
    (Réflexions et maximes, p.59, Félix Alcan, 1911)
     
  29. La dernière leçon de la vie, c'est la bonté et le sacrifice de soi-même à  ce qu'on sent être son devoir.
    (Réflexions et maximes, p.59, Félix Alcan, 1911)
     
  30. Je m'étonne de la quantité de choses auxquelles peut croire un homme qui dit ne croire à  rien.
    (Réflexions et maximes, p.60, Félix Alcan, 1911)
     
  31. Libre pensée, libre croyance : même illusion psychologique.
    (Réflexions et maximes, p.60, Félix Alcan, 1911)
     
  32. De tous ces gens qui se flattent d'être des libres-penseurs, combien pensent vraiment par eux-mêmes ? Ils en appellent à  la parole de celui-ci, à  l'écriture de celui-là , ils ordonnent des processions pour fêter leurs saints, portent des bannières aux devises mirifiques, enfoncent avec fracas des portes ouvertes, insultent à  autrui à  dessein de cultiver la fraternité, se poussent dans la servitude sous le nom de liberté et répètent les pires bêtises de la Révolution, à  défaut des crimes, laissant à  quiconque les observe de sang-froid l'impression de déments où de pantins.
    (Réflexions et maximes, p.60, Félix Alcan, 1911)
     
  33. Ce qui rend un homme intolérant, ce n'est pas la qualité de sa doctrine, mais l'assurance qu'il a de posséder la vérité. À quels excès ne vient point un « libre-penseur », dès qu'il a foi en lui-même e si peu qu'il ait quelque âcreté dans le sang !
    (Réflexions et maximes, p.61, Félix Alcan, 1911)
     
  34. L'irréligion a son dogmatisme. Comment n'aurait-elle pas son fanatisme ?
    (Réflexions et maximes, p.61, Félix Alcan, 1911)
     
  35. Je ne suis pas un croyant, mais la confiance présomptueuse des négateurs me fait pitié ou m'irrite. Se sont-ils jamais demandé ce qu'il peut y avoir de vérité dans l'attitude des hommes religieux ? N'ont-ils jamais soupçonné qu'il entre sans doute plus d'erreur dans la passion irréligieuse que dans l'autre ? Ces gens se piquent de philosophie et ne sont que la caricature des philosophes.
    (Réflexions et maximes, p.61, Félix Alcan, 1911)
     
  36. Railler des croyances qui étaient celles de personnes que j'ai aimées ou honorées, je ne m'en donne pas la permission et je n'en ai pas le goût.
    (Réflexions et maximes, p.62, Félix Alcan, 1911)
     
  37. Les fanatiques de l'irréligion expliquent et justifient l'attitude religieuse par cette façon de réaction violente qui est l'irrespect et la fureur anarchique.
    (Réflexions et maximes, p.62, Félix Alcan, 1911)
     
  38. Le respect comporte l'estime de soi-même autant que le sentiment de la dignité d'autrui ; l'irrespect s'accompagne plus qu'on ne croit de servilité et de platitude.
    (Réflexions et maximes, p.62, Félix Alcan, 1911)
     
  39. Il semble que nous travaillions en France à  tuer le respect. Ignorons-nous donc qu'il est une condition de la dignité des personnes autant qu'il est une force sociale ?
    (Réflexions et maximes, p.62, Félix Alcan, 1911)
     
  40. Les religions sont l'expression de la détresse humaine : là  surtout est leur vérité et leur force.
    (Réflexions et maximes, p.63, Félix Alcan, 1911)
     
  41. On est religieux avec sa crainte, avec son amour, avec son désir du beau, avec son intelligence ; on n'est jamais religieux tout simplement. Il semble que ce sentiment, en son haut état, soit fait de toutes les forces du désir comme des plus pures et des plus constantes aspirations de l'âme.
    (Réflexions et maximes, p.63, Félix Alcan, 1911)
     
  42. Le fétichisme apparaît au fond de tous les cultes. Il préside à  la naissance des religions, il les accompagne dans leur triomphe et survit à  leur ruine.
    (Réflexions et maximes, p.63, Félix Alcan, 1911)
     
  43. À défaut de religion, les hommes garderaient encore des superstitions, aussi longtemps qu'il y aura devant eux de l'inconnu.
    (Réflexions et maximes, p.63, Félix Alcan, 1911)
     
  44. Religions, institutions, doctrines ne sont déjà  plus que choses décomposées, qu'elles nous semblent toujours solides et résistantes. Tel un organisme détruit, que son squelette soutient quelque temps encore : mais le squelette même s'écroule à  la fin, en emportant cette apparence de vie.
    (Réflexions et maximes, p.64, Félix Alcan, 1911)
     
  45. Ce qui doit périr périra. Le temps suffit à  faire les ruines où notre main a si grande hâte de s'employer.
    (Réflexions et maximes, p.64, Félix Alcan, 1911)
     
  46. Nous ne pouvons nous défendre d'un sentiment de tristesse devant tout ce qui finit.
    (Réflexions et maximes, p.64, Félix Alcan, 1911)
     
  47. Les grandes créations de la vie restent dans la vie ; rien ne meurt tout à  fait dans l'âme humaine de ce qui a pu y naître.
    (Réflexions et maximes, p.64, Félix Alcan, 1911)
     
  48. Religieux, irréligieux : deux classes d'hommes qui ont toujours existé.
    (Réflexions et maximes, p.65, Félix Alcan, 1911)
     
  49. Un simple croyant risque de perdre toute religion en cessant de croire. Celui qui est religieux par tempérament ne cesse pas d'être religieux en perdant sa foi particulière.
    (Réflexions et maximes, p.65, Félix Alcan, 1911)
     
  50. La foi berce le doute pour l'endormir ; mais le doute a le sommeil léger, il s'éveille et crie quand elle balance le berceau trop rudement.
    (Réflexions et maximes, p.65, Félix Alcan, 1911)
     
  51. Un point faible dans l'esprit, un point douloureux sur la peau : à  ces signes correspond un certain état de la croyance.
    (Réflexions et maximes, p.65, Félix Alcan, 1911)
     
  52. Héroïsme avec les forts, l'humilité chrétienne n'est couardise et la résignation chrétienne lâcheté qu'avec les faibles. Ainsi de bien des leçons, que l'inégalité des natures fait mentir.
    (Réflexions et maximes, p.66, Félix Alcan, 1911)
     
  53. Il est un grand catholicisme, comme il en est un petit.
    (Réflexions et maximes, p.66, Félix Alcan, 1911)
     
  54. Dans leur ardeur à  combattre l'à‰glise catholique, les églises protestantes ne voient pas qu'elles s'abîmeraient elles-mêmes sous ses ruines. Le protestantisme est une négation ; il ne se maintient que par l'affirmation qui est le catholicisme.
    (Réflexions et maximes, p.66, Félix Alcan, 1911)
     
  55. Le danger, pour une religion, ne vient pas des assauts qu'elle subit, mais de ses propres erreurs, du tour nouveau des intelligences, de l'usure séculaire qui attaque, transforme ou détruit toutes les institutions humaines.
    (Réflexions et maximes, p.66, Félix Alcan, 1911)
     
  56. Le plus souvent, les partis, comme les peuples vaincus, ne meurent pas des coups qu'on leur porte, mais des fautes qu'ils commettent ; ils s'appliquent encore, dans leur défaillance, à  consommer leur ruine.
    (Réflexions et maximes, p.67, Félix Alcan, 1911)
     
  57. Croyances et institutions se transforment ou périssent. Mais les politiques passionnés ou brouillons ne savent pas attendre l'heure des événements : ils s'imaginent, à  la façon des enfants, tromper le temps en poussant les aiguilles de leur montre ; ils veulent achever l'histoire dans l'espace de leur courte vie.
    (Réflexions et maximes, p.67, Félix Alcan, 1911)
     
  58. Pour notre doctrine pour notre parti, souhaitons le succès, jamais le triomphe !
    (Réflexions et maximes, p.67, Félix Alcan, 1911)
     
  59. Les changements qui se font dans la pensée et les sentiments des foules dépendent, plus qu'on ne croit, des inventions matérielles.
    (Réflexions et maximes, p.67, Félix Alcan, 1911)
     
  60. La philosophie passe moins aisément dans les faits, que les faits ne passent dans la philosophie.
    (Réflexions et maximes, p.68, Félix Alcan, 1911)
     
  61. La machine a cette puissance de transformer et multiplier l'espèce de mouvement qui était donné dans l'idée qu'elle réalise.
    (Réflexions et maximes, p.68, Félix Alcan, 1911)
     
  62. De Kant ou de Fulton, lequel a contribué le plus à  changer la face du monde ?
    (Réflexions et maximes, p.68, Félix Alcan, 1911)
     
  63. Du jour où les pèlerins se rendraient à  La Mecque en cab électrique ou en voiture à  pétrole, l'islamisme aurait une autre figure.
    (Réflexions et maximes, p.68, Félix Alcan, 1911)
     
  64. Les uns s'attendent à  la religion, les autres à  l'art, les autres à  la science. Mais ce sont des forces qui agissent toujours ensemble, et il ne paraît pas que les transformations sociales aient jamais dépendu ou doivent dépendre exclusivement d'une seule idée ou d'un seul fait.
    (Réflexions et maximes, p.68, Félix Alcan, 1911)
     
  65. Sous le décor variable des civilisations on retrouve à  peu près les mêmes personnages, comme les mêmes héros reparaissent sur le théâtre à  tous les actes d'une pièce.
    (Réflexions et maximes, p.69, Félix Alcan, 1911)
     
  66. Une philosophie, une religion, un idéal, c'est la toile peinte dont chacun de nous recouvre comme il peut le mur nu où sa destinée est de se briser le front.
    (Réflexions et maximes, p.69, Félix Alcan, 1911)
     

Paul Masson

  1. La parole a été donnée à  l'homme pour aiguiser sa pensée.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.36, Léon Vanier, 1896)
     
  2. Si le droit du seigneur a réellement existé, tous nos paysans ont du sang bleu dans les veines, et la roture de race n'est plus qu'un leurre.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.36, Léon Vanier, 1896)
     
  3. Les gens qui pour pénétrer le mystère de la vie analysent des cadavres sont à  peu près aussi bien avisés que ceux qui, en vue d'approfondir les lois de la balistique, disséqueraient des canons, une fois le coup parti.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.36, Léon Vanier, 1896)
     
  4. À la porte du Paradis terrestre fut placé un ange armé d'une épée. Rien ne peint mieux la déchéance de l'humanité que l'apparition de ce premier factionnaire.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.36, Léon Vanier, 1896)
     
  5. Je m'étonne toujours que l'eau qui tombe sur Paris n'ait pas un petit goût salé.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.36, Léon Vanier, 1896)
     
  6. Avant de prendre un nouvel amant, les femmes devraient bien se dire que ce sera l'ancien d'un autre. Après tout, c'est peut-être ce qui les décide.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.37, Léon Vanier, 1896)
     
  7. Rien ne m'inquiète plus que ces mots : le tribunal de l'histoire. Si encore c'était une cour d'appel !
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.37, Léon Vanier, 1896)
     
  8. Demandez à  un géomètre la mesure de la terre, mais ne lui demandez pas celle de son nez.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.37, Léon Vanier, 1896)
     
  9. Je songe parfois que, si je deviens célèbre, on suspendra après ma mort aux arceaux d'une église de longues tentures noires parsemées de larmes d'argent. D'argent ! Travaillons ferme.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.37, Léon Vanier, 1896)
     
  10. Il y a des silences tellement accusateurs qu'ils ne peuvent être victorieusement réfutés que par le silence. C'est ce qui explique le peu de bruit qu'on entend dans certains rassemblements du grand monde.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.37, Léon Vanier, 1896)
     
  11. Ce n'est jamais que nos prédécesseurs immédiats que nous dénigrons. Reculés dans le lointain de l'histoire, ils redeviennent héroïques. Le casque est glorieux, la perruque ridicule. Qui sait si un jour le chapeau haut de forme, lui aussi, ne sera pas un emblème chevaleresque, ou tout au moins de majesté ?
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.38, Léon Vanier, 1896)
     
  12. Rien ne nous attire plus que la froideur. Ce qui séduit avec une telle puissance tous les aimants de la terre, c'est une masse insensible et dure, là -haut, vers les glaces du pà´le.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.38, Léon Vanier, 1896)
     
  13. À mes heures d'appréhension je vois poindre la féodalité du mastroquet.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.38, Léon Vanier, 1896)
     
  14. On me citait une femme du monde si soucieuse de l'étiquette que ce qui la choquait le plus dans le péché d'Adam et d'àˆve, c'est de penser qu'ils n'avaient pas pelé leur pomme.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.38, Léon Vanier, 1896)
     
  15. Le style c'est l'homme. Chez ceux qui écrivent pour avoir du pain, on trouve le plus souvent des phrases empâtées.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.39, Léon Vanier, 1896)
     
  16. On a découvert en à‰gypte, à  l'aide de puissants microscopes, un animal long d'un vingtième de ligne qui s'occupe activement à  saper la pyramide de Chéops. Courage, petit insecte. Tu seras au bout de ta tâche avant que nous soyons parvenus à  renverser le veau d'or et à  réconcilier le suffrage universel avec la raison universelle.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.39, Léon Vanier, 1896)
     
  17. La vie est un songe, mais les veilleurs de nuit crient trop fort.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.39, Léon Vanier, 1896)
     
  18. C'est souvent à  leurs heures moroses que nos soeurs révèlent leur charme le plus irrésistible. La perle n'est due qu'à  un accès de mauvaise humeur chez l'huître.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.39, Léon Vanier, 1896)
     
  19. Les grands hommes sont les cimes de l'histoire, mais, comme en géographie, on compte plus de glaciers que de volcans.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.40, Léon Vanier, 1896)
     
  20. Celui qui en faisant souffrir souffre n'est qu'à  demi méchant. Ce qui a fait donner à  certaine pierre le nom d'infernale, c'est qu'elle reste froide en brûlant.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.40, Léon Vanier, 1896)
     
  21. L'homme qui a broyé le plus de coeurs féminins depuis le commencement du monde s'appelait Don Juan Tenorio. Il fallait du ténor dans l'affaire.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.40, Léon Vanier, 1896)
     
  22. Du tissu de nos rêves, quand il est usé, sachons faire de la charpie.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.40, Léon Vanier, 1896)
     
  23. Les êtres à  principes trop rigides naufragent sans rémission. Tels ces navires supérieurement équilibrés qui, lorsqu'ils chavirent, sont invinciblement maintenus la tête en bas, de par la perfection même de leur carène.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.40, Léon Vanier, 1896)
     
  24. La beauté est la clef des coeurs, la grâce le passe-partout, la coquetterie le rossignol, et le flirt la pince-monseigneur.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.41, Léon Vanier, 1896)
     
  25. Il n'a survécu au déluge que les animaux qui ont été embarqués dans l'arche. Il faut avouer que l'occasion était belle pour étouffer la dynastie des puces.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.41, Léon Vanier, 1896)
     
  26. On parle souvent des replis de la conscience : ils ont sans doute été ménagés pour masquer les déchirures.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.41, Léon Vanier, 1896)
     
  27. Même chez le coeur dissimulé, la colère se décèle par un pâle visage ; tel le feu caché dans le bois se trahit par les pleurs de la sève.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.41, Léon Vanier, 1896)
     
  28. Le même objet est regardé par l'ascète comme un sépulcre blanchi, par l'amant comme un bonbon pétri de roses, et par le lion comme cinquante kilos de viande.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.42, Léon Vanier, 1896)
     
  29. Des plus illustres penseurs on cite au maximum vingt mots. Il ne s'agit que de les prononcer.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.42, Léon Vanier, 1896)
     
  30. Les héraldistes appellent rampant un lion qui fait le mouvement de grimper. Faut-il voir là  une ironie ?
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.42, Léon Vanier, 1896)
     
  31. D'après les lois mêmes de la géométrie, le monde ne saurait remplir le coeur de l'homme. En effet, le monde est rond et le coeur triangulaire. Or, on sait qu'un rond inscrit dans un triangle ne le remplit pas.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.42, Léon Vanier, 1896)
     
  32. Il y a des gens dont le cerveau est comme un pulvérisateur. Ils n'émettent pas des opinions, ils les émiettent.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.42, Léon Vanier, 1896)
     
  33. Le poison administré à  Britannicus ayant noirci son visage, l'empereur fit étendre dessus une couche de blanc pour simuler la pâleur de la mort naturelle, mais une grosse pluie survint qui lava le fard. L'histoire est cette pluie.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.43, Léon Vanier, 1896)
     
  34. L'amour est l'escalier qui mène au ciel, la foi en est le garde-fou.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.43, Léon Vanier, 1896)
     
  35. Pour persuader la multitude, il ne faut que des cris et des gestes ; le peuple n'écoute pas, il regarde parler.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.43, Léon Vanier, 1896)
     
  36. L'art de la parure chez la femme est centrifuge, non centripète. La grâce doit se communiquer moins de l'écharpe à  elle que d'elle à  l'écharpe.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.43, Léon Vanier, 1896)
     
  37. Prodiguer à  tout propos les plus subtiles saillies est aussi déplacé que de couper le pain avec un rasoir.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.43, Léon Vanier, 1896)
     
  38. Nous n'apprécions que ce qui est surpris, dérobé. Jusqu'aux vulgaires suiveurs, s'ils s'aperçoivent que la jupe dont ils ont élu le sillage est relevée à  dessein, ils abandonnent la chasse.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.44, Léon Vanier, 1896)
     
  39. En matière de calomnie on se partage la besogne ; la loi frappe les coupables, l'opinion les victimes.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.44, Léon Vanier, 1896)
     
  40. La logique n'est qu'une escrime. À quoi bon l'apprendre quand on ne veut pas se battre ?
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.44, Léon Vanier, 1896)
     
  41. La Révolution française qui a proscrit si rigoureusement le droit de banalité aurait bien dû l'interdire à  ses historiens.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.44, Léon Vanier, 1896)
     
  42. Personne ne se donne sans résistance. Le nuage lui-même, au moment de se répandre en eau bienfaisante, prend un air maussade.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.44, Léon Vanier, 1896)
     
  43. Les esprits puissants réussissent rarement dans le genre familier. Il n'appartient qu'à  Hercule de déposer quand il le veut sa massue pour jouer avec des fuseaux.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.45, Léon Vanier, 1896)
     
  44. On peut tout faire accroire aux femmes, sauf qu'on est aimable.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.45, Léon Vanier, 1896)
     
  45. Quelque polychrome que soit leur pelage, les vaches ne donnent de lait que d'une seule couleur : ainsi, parmi toutes les variétés de devoirs, la charité les résume tous.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.45, Léon Vanier, 1896)
     
  46. Les religions sont comme des boussoles de poche ; elles vous indiquent bien la direction en gros, mais à  mesure qu'on s'approche du pà´le, elles s'affolent.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.45, Léon Vanier, 1896)
     
  47. Il y a des gens qui ont mauvaise grâce, même en s'avouant coupables, comme ces errata où s'étale une bévue nouvelle.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.45, Léon Vanier, 1896)
     
  48. L'amour parle avec éloquence par pantomimes, mais il ne s'exprime jamais plus clairement qu'en inscriptions bilingues.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.46, Léon Vanier, 1896)
     
  49. La civilisation développe même chez nos frères les plus humbles le goût de la réclame. Ce n'est que dans les basses-cours que l'apparition du moindre oeuf est annoncée à  grands gloussements ; dans la forêt la ponte s'accomplit sans publicité.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.46, Léon Vanier, 1896)
     
  50. Dans une maison sans cheminée on ne fait point de feu sous peine d'être asphyxié ; de même dans une âme qui n'a point d'ouverture sur l'infini une passion ne peut s'allumer sans étouffer toutes les voisines.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.46, Léon Vanier, 1896)
     
  51. La nature est insensible à  nos douleurs. N'est-il pas effroyable de penser que les bois de la guillotine peuvent jouer ?
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.46, Léon Vanier, 1896)
     
  52. Qui nous empêche de vivre en frères ? Peut-être la seule présence de nos soeurs.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.47, Léon Vanier, 1896)
     
  53. L'art embellit tout au plus la vie ; la religion seule l'emplit.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.47, Léon Vanier, 1896)
     
  54. Un Français à  l'étranger se reconnaît à  deux signes : 1° à  ce qu'il parle très bien le français ; 2° à  ce qu'il ne parle nulle autre langue.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.47, Léon Vanier, 1896)
     
  55. Si l'inconduite consiste à  courir de la brune à  la blonde, le plus grand débauché est le monogame, puisque pour lui une femme les résume toutes.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.47, Léon Vanier, 1896)
     
  56. Est-ce pour symboliser la victoire ou pour nous rappeler combien tout domicile est précaire que tant de ciels de lit dans nos alcà´ves ont reçu la forme de tentes ?
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.47, Léon Vanier, 1896)
     
  57. Le chemin de la ruine est toujours en bon état ; ce sont les voyageurs eux-mêmes qui paient les frais d'entretien.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.48, Léon Vanier, 1896)
     
  58. « Les jours se suivent et ne se ressemblent pas. » - « Les jours se suivent et se ressemblent. » Telles sont les deux plaintes qu'on entend exhaler du matin au soir par les pauvres humains, souvent par le même, et au même instant.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.48, Léon Vanier, 1896)
     
  59. « Donnez-moi un point d'appui et je soulèverai le monde. » Hélas ! que d'Archimèdes ont follement cherché ce point d'appui sur une épaule potelée mais glissante !
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.48, Léon Vanier, 1896)
     
  60. Les souvenirs d'enfance affluent à  la pensée du vieillard. L'âme veut être enterrée dans sa patrie, comme le corps.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.48, Léon Vanier, 1896)
     
  61. « Le Français né malin... » Ceci fut écrit à  une époque où on était souvent changé en nourrice.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.48, Léon Vanier, 1896)
     
  62. Une plaie qui intéresse les poumons d'un blessé intéresse surtout ses héritiers.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.49, Léon Vanier, 1896)
     
  63. Le temps n'améliore que les Rubens peints. La magie de sa patine ne régit que les chaires sur la toile, non les chairs sous la toile.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.49, Léon Vanier, 1896)
     
  64. Est-il rien de plus ignoble que deux époux se donnant mutuellement leurs biens par testament ? C'est comme s'ils prenaient déjà  le demi-deuil.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.49, Léon Vanier, 1896)
     
  65. En vieillissant les sutures du crâne s'affermissent, celles du paletot se relâchent.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.49, Léon Vanier, 1896)
     
  66. L'esprit tue tout chez celui qui en possède ; les terrains qui produisent le sel sont impropres à  toute autre culture.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.49, Léon Vanier, 1896)
     
  67. Toutes nos jalousies n'évitent la férocité que pour sombrer dans le ridicule : elles sont à  guillotine ou à  tabatière.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.50, Léon Vanier, 1896)
     
  68. À Paris, les commencements de relations sont beaucoup plus cordiaux que partout ailleurs. On sent instinctivement qu'il n'y en a pas pour longtemps.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.50, Léon Vanier, 1896)
     
  69. Comment veut-on que nous échappions à  la mièvrerie et à  l'affectation, quand notre planète elle-même par son inclinaison sur l'écliptique prend des airs penchés ?
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.50, Léon Vanier, 1896)
     
  70. Le plus grand malfaiteur qui sera jamais fut certainement Caïn, celui qui égorgea le quart du genre humain.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.50, Léon Vanier, 1896)
     
  71. Il est peu de femmes dont un chapeau ne tourne la tête avant de la coiffer.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.50, Léon Vanier, 1896)
     
  72. Les vieillards, dit-on, retombent en enfance. Pas de bien haut.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.51, Léon Vanier, 1896)
     
  73. Pourquoi nos romanciers se tourmentent-ils à  nous décrire les charmes de leur héroïne ? Ils n'ont qu'un mot à  dire : « Lecteur, elle était aussi jolie que ton avant-dernière maîtresse. »
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.51, Léon Vanier, 1896)
     
  74. L'homme n'aime qu'une fois dans sa vie. En effet, à  chaque amour qui lui pousse, il a soin de dire : « Voilà  une nouvelle vie qui commence. »
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.51, Léon Vanier, 1896)
     
  75. Malgré les apparences, il est juste et équitable que le mariage n'ait pas été compris parmi les jeux de hasard. Il est rare en effet que les joueurs ne se rendent pas bientà´t les coeurs qu'ils ont échangés.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.51, Léon Vanier, 1896)
     
  76. Le sage est le roi de l'humanité. Les autres rois ne gouvernent que des patries.
    (Les Pensées d'un Yoghi , p.51, Léon Vanier, 1896)