Citations ajoutées le 25 octobre 2014

Eugène Marbeau

  1. L'innocence est la page blanche, la vertu est la page écrite.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  2. Certaines vertus sont, pour le voisin, plus insupportables que certains vices.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  3. Le vice a ses hypocrites, comme la vertu.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  4. Les vices du prochain sont les flatteurs des nôtres.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  5. Si la vertu est la victoire après le combat, le repentir est le combat qui recommence après la défaite.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  6. Le remords pleure le repos perdu, le repentir pleure le devoir méconnu.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  7. Il y a des êtres dont tous les mobiles sont élevés, comme il y a des fleurs qui regardent toujours le soleil.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  8. Nous jugeons les autres sur leurs actes, et nous-même sur nos intentions.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  9. Nous jugeons plus sévèrement que le monde nos sentiments, et moins sévèrement notre conduite : seuls nous connaissons nos mobiles et nos tentations.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  10. Le moraliste peut observer les causes et les effets humains de la croyance en Dieu. La croyance elle-même lui échappe : elle est matière de foi et non d'observation.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  11. Les pensées d'un auteur sur Dieu ne nous font pas connaître Dieu; mais elles nous font connaître l'auteur.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  12. On peut juger un homme ou un peuple sur son Dieu : il lui prête les idées qu'il a et les sentiments qu'il voudrait avoir.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  13. Chaque homme adore en son Dieu son idéal.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  14. Les phénomènes naturels et la terreur qu'ils inspirent peuvent rendre l'homme superstitieux : c'est le besoin de justice et l'aspiration au bonheur qui le rendent religieux.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  15. Le besoin de retrouver une espérance ramène à Dieu les vieillards.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  16. Celui qui aime Dieu compte bien être aimé de Dieu : son imagination et ses espérances le paient de cet amour qu'il croit désintéressé.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  17. L'amour de Dieu est la seule affection qui ne dépende que de nous. Aussi est-ce la seule qui ne nous trompe jamais.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  18. Dans le cours banal de la vie, les hommes nous font oublier Dieu ; au jour de l'épreuve, leur impuissance nous ramène à lui.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  19. La crainte ramène à Dieu plus que la douleur, le malheur redouté plus que le malheur accompli.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  20. Les Romains offraient des sacrifices à Janus pendant la guerre et fermaient son temple pendant la paix.
    N'est-ce pas ainsi que partout et toujours l'homme agit avec son Dieu ?

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  21. Le Dieu auquel je crois de toutes les forces, de mon âme, voilà le Dieu qui, pour moi, soulèvera des montagnes.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  22. «J'y crois parce qu'il m'est doux d'y croire.» Tel est le raisonnement de tous les croyants : c'est celui de Pascal, avec ses « raisons du coeur » que la raison ne comprend pas.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  23. L'objet du doute est ce que ma raison refuse d'admettre, comme ne m'étant pas démontré.
    L'objet de la foi est ce qui s'impose à ma croyance, quoique ne m'étant pas démontré.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  24. Croire sans oser raisonner sa croyance, n'est-ce pas déjà douter.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  25. Il y aurait une chose plus contraire à la raison que la légende la plus déraisonnable : ce serait la prétention d'expliquer à l'aide de la raison seule les mystères inexplicables qui enveloppent l'univers.
    L'homme simple ne s'y trompe pas : il exige une légende surnaturelle pour appuyer sa foi.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  26. Le surnaturel est l'explication que l'homme se donne à lui-même des phénomènes dont il ne discerne pas les causes.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  27. C'est par leurs côtés surnaturels que les religions s'emparent de notre foi ; c'est par leurs côtés humains, qu'elles s'emparent de notre conduite.
    Les enfants sont sages pour plaire à l'Enfant Jésus ; les femmes veulent être pures comme Marie ; mais Dieu le père a peu de serviteurs : il est trop loin de l'humanité.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  28. Ce qu'on appelle la Science est une succession d'hypothèses qui changent sans cesse; l'hypothèse d'aujourd'hui raille celle d'hier et sera raillée par celle de demain.
    Comment la science pourrait-elle donner une règle morale à l'humanité!

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  29. L'enseignement de la vie, quand il n'est pas épuré par un idéal de religion, de philosophie ou de charité, c'est le Struggle for life dans toute sa brutalité.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  30. Croire en Dieu, c'est trouver hors de soi un point d'appui.
    Ne pas croire en Dieu, c'est se réduire à sa propre infaillibilité.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  31. Sachons voir à travers les choses de la terre ce qu'elles laissent transparaître du ciel.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  32. Chacun de nous a dans son coeur le germe de tous les bons et de tous les mauvais penchants du coeur humain.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  33. Les mêmes instincts s'agitent au fond de tous les coeurs. Ce qui distingue les hommes c'est la valeur relative que prennent dans leur âme des instincts identiques.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  34. Chacun de nos penchants peut s'épanouir en une vertu ou se flétrir en un vice.
    Le caractère, l'éducation, l'occasion lui donnent sa direction définitive.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  35. L'éducation ne supprime pas nos mauvais instincts. Elle nous enseigne qu'il est louable de les maîtriser, qu'il est décent de les masquer.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  36. L'homme du peuple dit: « Un héritage. »
    L'homme du monde dit «Un deuil.»

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  37. Pour connaître l'homme, regardons l'enfant, que l'éducation n'a pas encore dressé à déguiser son égoïsme.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  38. Si nous ne voulons pas mépriser les hommes, n'observons pas trop les chiens : leur coeur ferait honte à notre indifférence, leur cynisme nous révélerait ce que cache notre hypocrisie.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  39. Les sentiments mènent les hommes, les idées mènent l'humanité.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  40. Nous obéissons à nos sentiments plus qu'à notre raison.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  41. L'expérience d'autrui ne touche que notre raison. La nôtre est une blessure qui pénètre jusqu'à notre sentiment.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  42. L'enseignement de l'exemple est le seul qui entraîne, parce que l'exemple, c'est la vie, au lieu d'être la leçon.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  43. Tel qui n'accompagnait pas sa mère à l'église, va à l'église pour y conduire son enfant.
    On sent mieux le devoir de donner l'exemple que celui de le suivre.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  44. Le Bon Sens varie avec les temps et avec les lieux. Il est le résumé des idées et des coutumes moyennes reçues dans le pays et dans le siècle de celui qui parle.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  45. Il y a deux sortes d'esprits ceux qui créent et ceux qui comprennent.
    Il y a encore ceux qui ne comprennent même pas.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  46. Il y a plus de lacunes dans un grand esprit que dans un grand coeur.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  47. Il faudrait avoir de l'esprit pour s'apercevoir qu'on est bête.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  48. L'esprit des gestes fait valoir l'esprit des paroles.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  49. L'homme qui gesticule trop ressemble à un singe.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  50. L'expression, l'accent, le regard, c'est l'âme qui transparaît à travers la matière ; c'est l'involontaire qui passe à travers le convenu.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  51. Les qualités rares ne valent pas les petites qualités de tous les jours : on a si rarement occasion d'y faire appel.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  52. Les esprits absolus sont des esprits étroits qui ne voient qu'un côté des choses.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  53. L'esprit paradoxal saisit dans une question le côté le plus imprévu,l'isole de tous les autres, et en tire imperturbablement des conséquences logiques et fausses.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  54. Le théoricien se perd dans ce qui devrait être : l'homme pratique se préoccupe de ce qui est.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  55. La théorie nous montre le but à atteindre ; la pratique, le terrain à parcourir.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  56. Le novateur et le rétrograde sont également butés contre le sens commun : ils ne se demandent pas si une chose est bonne, mais si elle est nouvelle. Ce point suffit à l'un pour l'approuver, à l'autre pour la condamner.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  57. Quand un homme dit souvent « Je ne sais pas cela » il y a des chances pour qu'il soit très instruit.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  58. L'habileté est l'art de se servir de la force, et au besoin de s'en passer.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  59. La pudeur, c'est le sentiment du papillon qui ne veut pas que son aile soit même effleurée.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  60. La modestie, comme la timidité, dérive souvent d'une sorte de pudeur.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  61. On n'apprécie bien que ce qu'on a perdu.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  62. On sent mieux le prix d'un bien moral quand on le possède, d'un bien matériel quand on le perd.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  63. Lorsqu'après un revers on accuse la fortune, on oublie volontiers le point d'où l'on est parti pour ne songer qu'à celui d'où l'on est tombé.
    Bonaparte a vingt ans eût-il rêvé qu'il serait un jour souverain de l'ile d'Elbe?

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  64. Tout change sans cesse, les choses ne se fixent que dans le souvenir, et la mémoire elle-même est fugitive.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  65. Le livre que je relis, le pays que je revois, l'ami que je retrouve, je les regarde avec d'autres yeux, je les juge avec un autre coeur.
    Ce n'est pas eux, c'est moi qui ai changé.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  66. Quand tout a changé autour d'un homme, c'est lui que le monde accuse d'avoir changé.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  67. L'homme serait bien malheureux s'il était condamné à se survivre, et à voir comment lui succèdent ses héritiers.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  68. Notre pensée s'arrête volontiers sur les rêves de l'avenir ou du passé; elle glisse sur le présent, dont la réalité brutale se prête mal aux illusions.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  69. Ce qui assombrit la vie, c'est moins le poids du présent que le regret du passé et la préoccupation de l'avenir. On n'est heureux, enfant, que parce qu'on les ignore ; homme,que quand on les oublie.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  70. Le moment présent est vite passé: c'est le souvenir qui dure.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  71. Le souvenir transforme en rêve ce qui n'était qu'une réalité.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  72. Sans espérance il n'y a pas de désirs, mais des rêves ou des regrets.
    Sans espérance il n'y a pas de patience, mais du découragement et de la lassitude. Pour être patient il faut espérer quelque chose.
    Sans espérance il n'y aurait même pas de résignation. La résignation n'attend plus rien sur la terre, mais elle cherche au-delà, et elle espère encore.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  73. Il y a de l'espérance même dans la crainte : au moment où le malheur s'accomplit, notre coeur se brise, et ce déchirement est précisément la perte de l'espérance.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  74. La crainte est aveugle comme l'espérance : bandeau noir et bandeau rose.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  75. Se plaindre, c'est espérer encore.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  76. Le rêve est l'espérance de ce que la raison n'ose espérer.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  77. On trouve le temps long quand on ne pense qu'à soi.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  78. Le temps paraît long, moins par le vide de l'heure présente que par l'impatience de l'heure attendue.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  79. Quelle que soit la durée d'un voyage, un mois, un jour, une heure, c'est quand nous approchons du but que le temps commence à nous paraître long. Notre réserve de patience s'épuise quand nous apercevons le port.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  80. La solitude, comme la nuit, a ses fantômes.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  81. Nos peines sont plus vives dans la solitude : la plus faible lumière blesse le regard quand la nuit est profonde.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  82. Ce n'est pas en vivant avec les hommes que l'on devient misanthrope; c'est plutôt en vivant toujours avec soi-même.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  83. On ne bâille pas quand on est seul.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  84. On donne plus facilement son temps que son argent, excepté quand ce temps vaut de l'argent.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  85. Le pauvre est plus volontiers secourable que le riche : on ne lui demande que sa peine.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  86. On croit donner mieux quand on donne beaucoup.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  87. Avec de l'argent on peut secourir, on ne peut consoler.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  88. Un partage entre héritiers ne se termine sans querelles que s'il se fait au premier moment. Chacun dispose alors d'un bien qui n'est pas encore entré dans sa fortune. Plus tard, toute concession lui enlève ce qu'il s'est habitué à considérer comme sien
    . C'est la différence entre une perte et un manque gagner.

    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  89. L'avarice est moins l'amour exagéré de l'argent que l'exagération de l'instinct de provision.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  90. L'avare est un bienfaiteur méconnu de l'ingrate humanité. Il ne prend pas sa part de jouissance, et il prend plus que sa part de l'épargne. Il accumule des forces dont profiteront les générations futures.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  91. De toutes les formes repoussantes que peut prendre l'amour de l'or, la plus haïssable, parce qu'elle est la plus dangereuse pour les autres, ce n'est pas l'avarice, c'est l'avidité.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  92. La manie d'amasser grandit avec l'impuissance de jouir.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  93. Les avares eux-mêmes méprisent l'avarice, dès qu'ils croient l'apercevoir chez les autres.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  94. Frère le premier homme avec lequel on se bat. Plus tard, c'est avec son ami.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  95. Quand les amis de notre ami nous parlent de lui, c'est pour gémir avec nous de ses défauts.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  96. Entrez sans être attendu dans un salon où l'on parle de vous. Chacun se tait avec inquiétude, et si la maîtresse de la maison essaie de vous répéter ce qui vient d'être dit, elle ne manque jamais de l'arranger un peu, tant il semble impossible que vous puissiez, sans en être froissé, entendre les réflexions que font sur vous en votre absence vos meilleurs amis.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  97. Une visite de condoléances est cruelle. La famille en deuil, lasse de pleurer, se reprenait à vivre. Rappelée au devoir de la douleur, il lui faut rouvrir sa blessure pour se montrer aussi triste que le visiteur est ému.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  98. La politesse est le soin de ne laisser paraître que ce qui doit plaire.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  99. La politesse nous commande d'offrir à un autre ce que nous aimerions à garder pour nous. L'usage du monde nous enseigne l'art difficile de rester poli sans trop nous sacrifier.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  100. Quand on s'excuse de ne pouvoir venir, de ne pouvoir rester, on invoque toujours une obligation ennuyeuse.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  101. Être franc, c'est dire ce que les autres ne diraient pas. C'est donc s'exposer à être blâmé par les autres.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  102. On n'est franc que quand on l'est contre soi-même.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  103. Divulguer le secret des autres n'est pas de la franchise, mais de l'indiscrétion.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  104. Faire la leçon aux autres n'est pas de la franchise, mais de l'orgueil.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  105. J'aime et je préconise la franchise, quand c'est moi qui juge les autres.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  106. Tout vice a pour serviteur le mensonge.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  107. Quand on a un but dominant auquel on sacrifie tout, un des premiers sacrifices qu'on lui fait est celui de la vérité. Plus le but est grand et désintéressé, moins on a de scrupules.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  108. Le mensonge souligne et aggrave le tort qu'il espérait cacher.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  109. Le maladroit ment sans tromper; l'habile trompe sans mentir; le plus habile amène sa dupe à se tromper elle-même.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  110. Le monde voit la faute, ne cherche jamais l'excuse, et n'aperçoit pas toujours l'expiation.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  111. La calomnie, comme la foudre, menace les sommets.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)
     
  112. L'incorrection appelle la calomnie.
    (Remarques et Pensées, Société d'éditions littéraires et artistiques, Paris, 1901)